Mission 4 : Nom : L'épave abandonnée Lieu : Une plage à Fiore Ouest Description : ça fait plusieurs années que des passants courageux ont remarqué ce bateau échoué aux bords de cette plage, mais personne n'a eu le courage d'y aller. Pour cause, celui-ci serait maudit et ferait subir, sous forme d'une illusion presque trop réelle, l'accident qu'il a subi. Arriverez-vous à surpasser cette illusion pour toucher la récompense ? Car oui, un historien aimerait que vous lui racontiez toute son histoire pour que personne n'oublie les pauvres victimes du naufrage. Récompense : 300 jewels Conditions : Solo pour rang S sinon il faudra des partenaires. Autres précisions : Pour les méchants, rien ne vous empêche de faire ça juste pour l'argent. Cependant, il y a de grosses chances qu'après cette mission, la tourista vienne vous embêter ou voler ce qui cause cette illusion.
Mission : L'épave abandonnée
Dans le quartier général d’Hydra Roar, une femme blonde se déplaça avec toute la noblesse qui la caractérisait tant. Elle descendit des marches et alla sur le côté de façon à voir une petite silhouette recroquevillée sur elle-même, dormant sous les escaliers. Une mine de dégoût se dessina sur son visage tandis qu’elle croisa ses bras contre sa poitrine et claqua sa langue contre son palais, elle s’impatientait et devait perdre du temps à réveiller un certain bon à rien.
« Tu comptes dormir dans ce trou à rats encore longtemps ? »
Il n’y avait pas besoin de plus pour que cette petite silhouette ouvre les yeux et se tourne vers cette femme importante au sein d’Hydra Roar : Mélusine Alric. Il ne parla pas et se leva doucement pour aller vers elle. Kazuki ne s’approcha pas de trop non plus, pour ne pas la froisser plus qu’elle ne l’était déjà, ni pour se prendre un coup perdu. Cette femme avait toujours été violente avec lui et sûrement d’autres donc il fallait se faire tout petit et se contenter d’obéir. Elle lui tendit un bout de papier, qu’il prit, et commença à faire demi-tour :
« Contentes-toi de trouver Caesar. »
Elle savait qu’il ne savait pas lire donc lui donner un papier avec le but de cette nouvelle mission écrit dessus ne servait à rien. D’un autre côté, elle estimait que ce n’était pas à elle de perdre son temps à le trouver… Même si lui glisser quelques remarques ô combien agréables n’aurait pas été de refus pour son propre plaisir. Une fois Mélusine hors de sa vue, Kazuki soupira et pencha sa tête sur le côté, tentant de comprendre ce qu’il y avait sur le papier malgré tout… Mais, il n’y avait rien à faire : sans cette bonne éducation de base, il ne pouvait pas créer de miracle. En tout cas, c’était une mission, il le savait, et elle devait être dure ou avoir une certaine importance puisqu’il devait avoir un partenaire. Caesar… Il n’avait jamais passé du temps avec lui malgré toute la place que Mélusine avait pris dans sa vie. Même en étant dans la même guilde que lui, il le connaissait seulement de vue, il ne lui avait jamais adressé la parole… Il ne parlait jamais à qui que ce soit, sa mère le lui interdisait justement, mais cette fois serait une exception il semblerait.
Etant donné qu’il ne le connaissait pas, ça allait être dur de le trouver dans le quartier général… Y était-il au moins ? Etait-il du genre à trainer dans la cuisine ? Dans la cantine ? Dans les chambres ? Ou c’était un dragueur par excellence qui voulait montrer tous ses atouts aux peu de femmes qu’il y avait dans cette guilde ? Ce n’était pas en restant planté là où il se trouvait, à regarder le plafond, qu’il allait le trouver. Ainsi, il commença ses recherches sans demander de l’aide à qui que ce soit… Ce n’était pas son genre de toute façon ! Cependant, au bout d’un certain temps, il croisa un autre membre de la guilde qui sursauta à sa vision, ne s’attendant pas à croiser quelqu’un alors qu’il venait à peine de sortir d’une salle après avoir finalisé son rapport.
« AH PUTAIN LE MASQUE CHELOU ! Tu m’as fait peur ! » Il le regarda d’un côté puis de l’autre, n’ayant pas besoin de voir son visage pour comprendre qu’il semblait chercher quelqu’un : « T’as le comportement du mec qui a besoin d’aide, alors… C’est quoi le ‘blem ? - Caesar… - Ah… Mélusine t’envoie le tuer parce qu’il l’a encore cherchée ? Tiens, il est par-là. »
Le membre d’Hydra Roar montra du doigt la pièce de laquelle il venait de sortir… Etait-il en train de faire un rapport ? Peut-être pas. Kazuki fit un mouvement de tête pour le remercier et commença à se diriger vers cette fameuse salle.
« Il est aussi froid que le QG de la guilde sérieux… Il fait trop flipper pour un mioche. »
Ah… ça, c’étaient les pensées du gars qui venait de l’aider. Toutefois, le bicolore ne fit rien. Non seulement il avait l’habitude, mais en plus, il ne devait pas prendre le risque de faire savoir qu’il avait une magie… Mélusine serait folle… Euh… Elle l’était déjà, mais ça n’arrangerait pas la chose ! Il entra dans la pièce, arriva par-derrière Caesar (CC Nathaniel) et tapota son épaule, en mesurant sa force car il serait dommage de la briser si tôt, pour attirer son attention. Sans un bonjour, ni merci, il lui tendit le papier de la mission pour que, accessoirement, il sache à quoi consistait la mission donnée par la grande Mélusine en personne.
Caesar était nonchalamment en train de se reposer au quartier général de sa guilde. Heureusement qu'il y avait un bar et de quoi se divertir, parce que sinon jamais il n'y foutrait les pieds de sa vie. Ce trou à rats était perdu au milieu de la forêt, et quand il faisait froid on le sentait. Mais même Mélusine ne pouvait supporter le froid, alors de temps en temps elle mettait le chauffage. On était dans cette période où on ne crevait pas de froid à la guilde, alors le voici qui savourait un petit cocktail accoudé au bar. D'ailleurs, il ne serait pas venu non plus si la sorcière blonde n'exigeait pas de lui qu'il y passe chaque semaine, "au cas où" "des fois il faut faire des missions pour prouver que tu veux atteindre ton but, tu sais enc*** de Caesar de tes m-" bref classique. Bon cette dernière phrase il l'avait inventé, elle ne le disait pas comme ça, mais c'était comme ça qu'elle lui avait fait ressentir.
Du coup, sacré Caesar Lynch, tout égocentrique qu'il était, venait parfois aider aux affaires de sa guilde. Ils avaient besoin de lui et de sa superbe, alors que voulez-vous, il fallait bien de temps en temps utiliser ses fabuleux talents afin accomplir quelques missions et tâches pour leur compte. De plus, bien qu'il n'était pas rang S, tout le monde savait qu'il faisait partie des plus forts de la guilde. Et oui, sa magie ne servait à rien, pourtant il pliait la moitié de son organisation en combat et en habileté. Il ne s'était pas tourné les pouces toutes ces années à rien faire d'autre que quelques boucliers et essayer de crever par-ci par-là, il savait se défendre au corps à corps, encore lui fallait-il cependant se trouver une vraie arme pour se protéger encore plus efficacement. Enfin... Ça, c'est s'il tenait à se prémunir de la mort.
Mais malheureusement, ce statut un peu à part lui valait surtout de faire le sale boulot, et encore aujourd'hui cela allait se prouver. Il se retourna après avoir senti quelque chose lui tapoter l'épaule. Quel était donc le petit oiseau qui allait égayer cette fabuleuse journée qui s'annonçait ? Un humanoïde de probablement 1m5X au moins, presque frêle, lui faisait face. Caesar essayait de lire son regard tandis qu'il lui tendait un papier sans dire mot, mais difficile surtout qu'il ne voyait pas les traits de son visage, caché derrière un masque de renard toutefois très élégant à son goût, et même sublime, pensa-t-il. A vrai dire, il l'avait déjà aperçu quelques fois à la guilde, mais il ne parlait pas beaucoup aux gens, passant souvent en coups de vent, ou bien quand il y avait peu de monde. C'était le moment de briser la glace !
- Ah, merci pour la note ! fit-il en riant légèrement, plaisantant sur le fait qu'il s'agisse de sa note de bar. Il lu rapidement le papier avant de reporter son regard sur le petit renard qui semblait attendre en silence sa réponse. Il l'avait lu, de toute façon, donc autant entrer dans le vif du sujet. Super, on dirait qu'on veut vraiment nous envoyer au casse-pipe, ça promet... Bon, du coup, il faut qu'on se rende à la plage située à l'ouest de la région, c'est bien ça ? Pense à sortir ton plus beau maillot et ton meilleur écran total parce que ça va cogner sec ! ajouta-t-il avec un petit sourire. Il continua pour essayer de briser ce silence qui, selon lui, n'avait pas de raison d'être : Tu sais, tu peux m'appeler Caesar, pas besoin de me vouvoyer, je ne suis pas si inaccessible ! Ah, ce qu'il aimait le son de sa propre voix, regardez-le parler, parler, de cette voix mélodieuse ! Et toi, c'est quoi ton nom ? demanda-t-il en posant son menton dans sa main dans un geste de réflexion, semblant attendre patiemment et assidument la réponse.
Kazuki avait été réveillé par sa mère pour un bout de papier. Ne sachant pas lire, il ne pouvait pas savoir le but de la mission, mais ce n’était pas dur de comprendre qu’il s’agissait là d’une quête. Elle lui demanda de trouver Caesar, sûrement pour partir avec lui. Pourquoi lui et pas un autre ? Difficile de le savoir, cette femme faisait partie du peu de personnes dont il ne pouvait pas lire les pensées. Une fois qu’elle partit vaquer à ses occupations, le bicolore chercha ce fameux Caesar. Il finit par le trouver, grâce à un autre membre de la guilde, au bar de la guilde et lui tendit le bout de papier sans même le saluer. Sa nature et les interdictions de sa mère faisaient qu’il avait du mal à se lier aux autres ou même à commencer une conversation. Son aîné le remercia de la note… Kazuki pencha sa tête sur le côté, se demandant de quoi il parlait. Que ce soit l’humour ou cette histoire de note, il n’y comprenait rien. Lorsqu’il était en train de lire le papier, le Yaksha le regarda sans bouger comme s’il n'était qu’une statue de pierre. Puis, il finit par reprendre la parole… Ou plutôt lui dire officiellement le but de la mission puisqu’il ne le savait toujours pas. Il haussa les épaules lorsque Caesar lui demanda s’ils devaient bien aller à l’Ouest de Fiore, sur une plage. S’il le disait après avoir lu le papier, ça devait être ça !
« De la mayo… Pourquoi ? » Il repencha sa tête sur le côté.
Qu’est-ce que de la mayonnaise faisait dans cette histoire ? C’était bon pour assaisonner certains plats, mais elle avait d’autres bienfaits qu’il ignorait ?! Elle avait le pouvoir de les aider dans cette future mission ?! Il fallait qu’il aille dans la cuisine en chercher ! Le mage d’Hydra Roar ne connaissait pas les maillots de bains, ni la mer et ni l’écran total. Si Mélusine l’envoyait là-bas, c’était pour une bonne raison et parce qu’il ne risquait rien… Normalement ! Tant que ce n’était pas dans une grande ville, tout irait bien pour lui ! Puis, sans que Kazuki ne l’ait demandé, Caesar lui fit savoir qu’il n’avait pas besoin de le vouvoyer et se présenta… Non… Vraiment, ne te dérange pas mec, Kazuki n’avait rien demandé. Puis, s’en suivit un gros blanc lorsqu’il lui demanda comment il s’appelait. Hum… Idiot ? Bouffon ? Petit con ? Bon à rien ? Le Yaksha ? Petit ? On l’appelait par tellement de noms différents qu’il en oubliait le sien. Cependant, il finit par lui revenir ! Il valait mieux tard que jamais, non ?
« Kazuki… »
Sans prévenir, il reprit le papier et se dirigea vers la cuisine de la guilde pour prendre de la mayonnaise, ils en auraient besoin. Parler et faire ami-ami n’étaient vraiment pas pour lui. Il était plus dans l’action et la bagarre ! Si c’était une mission urgente, il ne valait mieux pas prendre du temps sinon Dieu sait ce que Mélusine pouvait leur réserver… Il ne valait mieux pas y penser. De retour vers le bar, il lui fit signe de le suivre, en tenant presque fièrement sa mayonnaise comme s’il lui disait silencieusement « voilà mon "maillot" », il était temps de partir. L’Ouest de Fiore était assez loin par rapport à leur quartier général, mais il leur suffisait de sortir de la forêt Mikage pour que les véhicules de la guilde, tout terrain et bien cachés, puissent être utilisés. Il en sortit un de sa cachette et se tourna vers Caesar :
« Conduis ? » Oui, parce qu’il n’était pas assez doué pour demander s’il savait conduire.
« De la mayo… Pourquoi ? » lui avait-il dit en se questionnant manifestement, enfin, c'était ce que son ton léger semblait suggérer. Il pouvait donc parler ! Peut-être que Caesar ne l'avait pas mis à l'aise ou s'était montré intimidant. Après tout, il était venu jusqu'à lui sans dire mot, alors peut-être qu'il était très timide. Ou pas habitué à parler avec les gens ? Il ne se souvenait pas l'avoir vu parler aux autres membres de la guilde, mais bon après il ne faisait pas non plus hyper attention aux gens de la guilde de manière globale. Il mis un peu de temps à comprendre ce qu'il voulait dire mais n'en fit pas cas. Après tout, peut-être qu'il n'associait pas la plage à la nage ! Tout le monde n'aimait pas se baigner dans de l'eau salée. C'est vrai que ça pouvait abimer la peau, de toute façon il avait plus dit ça pour blaguer qu'autre chose, jamais il ne mettrait lui-même les pieds cette gigantesque flaque de flotte salée.
Finalement, le petit renard s'appelait Kazuki. Un nom qu'il n'avait jamais entendu ! Il avait de belles sonorités et sonnait exotique, mais les sons qu'on entendait sur tous les prénoms des habitants de la région étaient si variés qu'il aurait été difficile de savoir d'où il était originaire simplement comme ça. « C'est un joli prénom » commenta-t-il sans arrière-pensée. Mais il n'eut pas le temps d'en dire plus puisque le renard, enfin, Kazuki, allait vers les cuisines et revint avec de la mayonnaise. Caesar partis dans un fou rire, essayant de ne pas hurler à gorge déployée pour ne pas trop attirer l'attention à eux, mais il rigola bien pendant quelques secondes, avant de se reprendre, tout en suivant le jeune au masque de renard vers la sortie de la guilde. Cela promettait de grandes choses si son sens de l'humour était aussi bon ! Enfin, Caesar allait pouvoir se plaire à ses côtés si l'ambiance se montrait si légère. Parce que la mission allait se dérouler dans une épave, alors il n'y avait pas vraiment de quoi se réjouir. Ils traversaient la forêt, Caesar avançant d'un air gai aux côtés de Kazuki, jusqu'à atteindre le "parking" de la guilde, bien caché cela dit. Débusquant un véhicule, son coéquipier lui intima de conduire sans rien ajouter d'autre.
« T'es économe sur les mots, toi ! Un homme d'action, je vois. Je vais conduire oui, pourquoi pas. » Évidemment, il savait conduire, à son âge ! Non rien à voir avec l'âge, c'était juste trop pratique pour son travail : amener les marchandises par soi-même était plus efficace et plus économe après tout. Il ouvrit la porte à Kazuki pour qu'il s'assoie côté passager avant de lui-même monter dans le véhicule. Heureusement, il allait pouvoir mettre le GPS parce qu'ils avaient une sacrée route à faire. Enfin, du centre à l'ouest, en réalité en moins d'une heure, ils y seraient.
Caesar et Kazuki semblaient très opposés tous les deux sur le plan de la discussion. L'un aimait parler, l'autre semblait très réservé. Mais le Lynch ne pouvait décemment pas la fermer pendant trente minutes de trajet, il ne supporterait pas, surtout pas en la présence d'une autre personne. Est-ce qu'il allait le trouver méga chiant, insupportable, casse-pieds ? C'était ce qu'il se demandait, même s'il était à l'aise socialement, le silence pouvait en calmer plus d'un après tout ! Enfin, Kazuki n'avait pas à s'en faire, il n'allait pas lui parler de la pluie et du beau temps bien sûr.
« N'empêche t'avais l'air super pressé ! T'avais pas des affaires à récupérer avant d'y aller ? J'ai pas à le faire vu que j'habite pas dans ce trou à rats pour ma part ! » dit-il en parlant de la guilde. Après tout, il avait déjà un simple sac sur lui, avec quelques affaires de rechange, un peu de nourriture, des médicaments, son fameux écran total, de la crème, de quoi survivre en fait ! « Et ce masque tu l'enlèves jamais alors ? Ça te fait un super style en tout cas, j'aime bien, j'irais bien vendre des jolies choses comme ça sur mes étalages ! » ajouta-t-il avec un air joyeux. Peut-être qu'il en disait trop, mais il ne sentait pas d'animosité de la part de Kazuki, juste une... indifférence pure et simple à ce qui semblait l'entourer. Après, il n'y avait rien de mal à savoir qu'il était marchand, il ne cachait pas son visage. En tout cas, ils allaient bien devoir se parler un petit peu, puisque s'ils tombaient dans une embuscade ou autre, il allait falloir communiquer pour établir un plan, ce qui était moins facile pour des gens qui ne s'étaient jamais parlé plus que ça ! Enfin, c'est ce qu'il pensait, puisque de toute façon, pour Hydra Roar, il valait mieux que la mission se passe le mieux possible, l'échec n'étant pas spécialement permis.
Kazuki ne comprenait décidément pas ce mec. Il avait dit son prénom et il le trouvait joli… S’il savait qui le lui avait attribué, peut-être qu’il reverrait son jugement ? Le jeune homme ne voyait pas en quoi il était joli, c’était un nom et c’était tout… Puis, personne ne le connaissait puisqu’on l’appelait autrement à chaque fois. Son futur partenaire de mission lui avait parlé d’un maillot que le Yaksha associait à la mayonnaise tout seul parce qu’il ne connaissait pas les maillots de bain et il était en train de se taper un fou rire tout seul. Qu’est-ce qu’il y avait de drôle ? Le bicolore regarda son pot de mayonnaise comme si la réponse serait écrite dessus, mais rien… Alors, il haussa les épaules. Ce n’était pas surprenant que Mélusine ait cherché et trouvé des alliés aussi détraqués qu’elle. Cependant, contrairement à elle, il pouvait cerner les pensées de Caesar, ça lui serait utile à un moment donné ! Mais comme d’habitude, Kazuki devait faire de son mieux pour ne montrer aucun signe de sa magie… Même si, parfois, les pensées pouvaient être vexantes ou énervantes à un point où il avait envie de frapper une personne pour la faire taire ou pour lui faire regretter ses pensées.
Une fois arrivés dans le parking caché de la guilde, rempli par peu de véhicules, mais des bien utiles, le mage d’Hydra Roar en sortit un de sa cachette et fit savoir à Caesar qu’il devait conduire avec ses propres mots… Son propre mot plutôt qui était compréhensible et c’était tout ce qui l’importait. Son partenaire ne pouvait pas s’empêcher de le faire remarquer en plus de dire qu’il était un homme d’action. Kazuki se tourna vers lui et pencha sa tête sur le côté. Non… ça n’avait aucun rapport et jamais il ne dirait la raison tant elle était honteuse pour lui. A son âge… Ne pas savoir tant parler… C’était trop gênant ! Lorsque Caesar lui ouvrit la portière côté passager, le plus jeune s’y installa sans mettre la ceinture de sécurité… Il connaissait les véhicules, mais pas toutes les subtilités. Il referma doucement la porte pour ne pas la casser, se tourna au maximum vers la fenêtre pour voir le paysage défiler et pas la tronche de ce mec qui s’il était très souple se ferait plaisir tout seul, peut-être !
Kazuki pensait pouvoir reprendre sa sieste là où il l’avait arrêtée avant d’avoir été dérangé par Mélusine, mais il semblerait que l’autre bavard ne soit pas de cet avis. Il commença à parler, lui dire qu’il était très pressé et lui demander s’il n’avait pas d’affaires à prendre avant. Il raconta que ce n’était pas son cas comme il ne vivait pas à la guilde. C’était normal, leur quartier général était tout sauf habitable par des personnes, mais le Yaksha n’avait pas spécialement le choix.
« Pas d’affaires. » Répondit-il simplement à sa première question.
Ou du moins pas beaucoup, mais il estimait que ce n’était pas important qu’il le sache. Puis, vint le sujet un peu plus compliqué pour le jeune homme : son masque. Dès que l’autre mage le mentionna, il se tourna vers lui, porta ses mains dessus par réflexe et pour l’empêcher qu’il l’enlève facilement si jamais il comptait réellement le faire. Méfiant et légèrement agacé, parce que sans le vouloir Caesar trouvait quelque chose de beau quelque chose qui était là pour le réduire à un moins que rien… C’était une interdiction de sa mère, pourquoi le trouver beau ? Il finit par lui répondre d’un ton un peu plus colérique et plus rapidement :
« Pas vendre ! Pas touche ! Occupe tes fesses ! »
Jamais il ne dirait la raison pour laquelle il devait porter ce masque sinon Mélusine le lui ferait regretter ! Kazuki se réinstalla correctement sur son siège et croisa ses bras contre lui comme le ferait un enfant en train de bouder. Ce mec le faisait trop parler et il ne le fallait pas, il en dirait trop sans s’en rendre compte ! Donc c’était décidé : il lui fallait garder le silence jusqu’à ce qu’ils soient arrivés. C’était dur de rester assis à ne rien faire alors son regard finit par se porter vers le GPS. Tout ce qu’il y avait d’affiché sur l’écran bougeait tout seul, c’était presque magique ! Par contre, il n'y comprenait vraiment rien. Il tapota dessus plusieurs fois pour savoir, à peu près, comment il pouvait marcher, mais ça ne faisait rien. Il avait cette curiosité qui faisait qu’il avait envie d’en savoir plus, surtout de savoir s’en servir, mais à la place, il s’énerva un peu dessus jusqu’à ce qu’il finisse par le casser à cause de sa propre force.
« Ah… » Il laissa un gros blanc puis porta ses deux mains au niveau de la bouche de son masque comme un gosse venant de faire une bêtise et regarda Caesar. Il ne pouvait pas le voir, mais il culpabilisait. « Cassé. »
Il ne restait plus qu’à croiser les doigts pour que leur destination ne soit plus si loin que ça et que Caesar ait un minimum de mémoire car… Vu que Kazuki venait de casser le GPS, on ne pouvait pas compter sur lui.
Visiblement, Kazuki ne parlait pas beaucoup, et seulement quand il posait directement des questions. En deux mots : pas d'affaires. Pourtant, il semblait vivre au QG, mais en réalité Caesar n'en savait pas plus que ça sur sa vie. Il s'occupait avant tout de ses histoires à lui et pas celles des autres membres, après tout c'était un individualiste. Déjà que venir au QG était synonyme de possiblement apercevoir l'objet de sa haine la plus profonde, alors si en plus on l'obligeait à mettre le nez dans les affaires des autres, il allait vite ne plus vouloir y venir. Mais heureusement, personne ne l'obligeait à grand chose, tant qu'il montrait qu'il allait toujours dans le sens des objectifs d'Hydra Roar, il était un électron libre. Etait-ce également le cas pour Kazuki ? Il semblait suivre ce qu'on lui disait, car on lui avait noté des instructions sur un papier, mais c'était là une première impression, peut-être qu'il y avait d'autres raisons à ça. Il le saurait seulement si l'homme au masque de renard serait enclin à lui dire. Et sa réaction quand il parla de vendre des masques aussi jolis dans son commerce confirma qu'il ne fallait pas pousser plus que ça avec le masqué. La réponse était violente et le fit presque sursauter, tant il ne s'y était pas attendu. Il restait concentré sur la route, mais fronça les sourcils suite à l'exclamation de Kazuki qui lui avait fait comprendre qu'il fallait qu'il s'occupe de ses affaires à lui plutôt que des siennes. Il semblait avoir peur qu'on lui prenne son masque. Caesar souffla légèrement pour se calmer, et toujours les sourcils froncés, il décida qu'il valait mieux rassurer son collègue de mission sur ses intentions.
- T'inquiètes, je vais pas te le piquer ! C'est le tien, je respecte ça, expliqua-t-il avec une voix calme.
Il était curieux, c'est vrai, mais pas au point de mettre mal à l'aise les gens et leur faire croire qu'il allait fouiller et voler leurs affaires. Malgré son égocentrisme, il était du genre à appliquer le "Ne fais pas ce que tu ne veux pas que l'on te fasse". Se faire voler, ça lui était déjà arrivé, et dans son commerce qui plus est. Ça n'avait rien d'agréable, à part pour la rencontre que ça lui avait permis de faire, bien sûr. Mais ça n'enlevait pas le goût amer de se faire dépouiller tel un malpropre. Kazuki avait fait voeu de silence après ça manifestement, et finalement Caesar n'y voyait pas grand chose à redire. Le renard avait sûrement compris que ses intentions étaient bonnes et qu'il avait voulu faire ami-ami pour ne pas qu'il y ait de tensions, alors pas besoin de forcer la conversation si cela signifiait finir tous les deux mal à l'aise. Concentré sur la route, il le vit jouer avec le GPS. Il n'en avait jamais vu ? Remarque, s'il ne conduisait pas, et qu'il ne comprenait pas comment ça fonctionnait, alors peut-être qu'il n'avait pas l'habitude de monter dans une voiture. Était-ce seulement déjà arrivé ? Les réflexions de Caesar s'interrompirent quand le GPS se cassa sous les assauts de Kazuki. "Ah..." ... "Cassé."
Effectivement. Le brun regarda le masqué avec un air dépité. Qu'est-ce qu'il avait foutu ? À peine dix minutes de route et les voici sans moyen de se repérer. Caesar soupira sans dire quoi que ce soit de plus, ça ne servait à rien d'accabler son passager. Il ouvrit la boite à gants et se saisit d'une carte à moitié déchirée, regarda à travers le pare-brise et la fenêtre où ils semblaient être, les panneaux indiquant quelques lieux proches.
- La personne qui s'est occupée de ce véhicule n'avait pas l'air d'en avoir grand chose à faire de la carte, mais heureusement qu'il y a des panneaux dans ce pays, dit-il à voix haute, réfléchissant quelques instants. On va continuer par là et normalement, on devrait arriver dans pas longtemps. D'ailleurs, t'as l'air super confiant, mais je pense que tu devrais quand même mettre ta ceinture. On va finir arrêté et on n'aura pas l'air fin quand il faudra ensuite expliquer à Mélusine qu'on s'est fait choper par les flics parce qu'on n'a pas respecté le code de la route... Après, on peut les bassiner, mais j'ai pas envie qu'ils nous prennent la voiture ou quoi tu vois.
S'ils se faisaient arrêter pour non-port de la ceinture et qu'ils ne paraissaient pas trop suspects, ce qui était vraiment peu probable vu leur dégaine et le peu de discussion de Kazuki ainsi que son masque, peut-être qu'ils allaient les laisser repartir avec une amende. Enfin bon, le permis ça commençait fort à dater pour lui, alors il préférait ne pas prendre de risque. Il indiqua à Kazuki la ceinture à côté de sa tête pour qu'il la tire, peut-être qu'il ne l'avait pas vu ?
- T'es jamais monté dans une voiture, je me trompe ?
La question sortait un peu de nulle part, mais c'était l'impression qu'il lui donnait. À moins qu'il soit monté seulement dans des véhicules sans ceinture, mais c'était inimaginable pour lui.
Après ce petit contretemps, ils avaient bien fini par arriver près de la plage, en moins d'une heure. Caesar ne conduisait pas comme un chauffard, mais frôlait la limite de vitesse à chaque fois pour ne pas perdre de temps. Depuis le véhicule, ils voyaient très bien l'épave un peu plus loin dans l'eau, imposante et menaçante, avec ses trous dans la coque et l'érosion causée par l'eau salée. Une dure mission allait s'annoncer.
En temps normal, Kazuki n’était pas tant réactif et ne disait pas énormément de mots, mais quand il s’agissait du masque qu’il était obligé de porter, c’était une toute autre histoire. Son ton devint plus fort, son débit de voix plus rapide et il y avait plus de mots dans ses phrases ! Même s’il avait beaucoup de mal à s’exprimer, le Yaksha espérait être clair sur son masque : il s’appelait pas touche et pas à vendre ! Son partenaire de mission se fit plus rassurant en lui disant qu’il ne lui piquerait pas. Il valait mieux pour lui, car jamais il ne se laisserait faire ! A force d’en avoir trop dit, à son goût, et par peur de trop déraper, Kazuki décida de garder le silence pour le reste de la route. Cependant, au bout d’un moment, il finit par craquer… Plutôt… Sa curiosité finit par craquer. Le GPS, même si le mage d’Hydra Roar ne savait pas qu’il se nommait ainsi, attirait son regard par sa mobilité presque magique. Il le bidouilla jusqu’à ce que le fait de ne pas comprendre son fonctionnement l’agace et fasse que son bidouillage devienne plus violent. L’appareil se cassa sous sa force et le premier réflexe du plus jeune fut de le faire savoir.
Kazuki s’attendait à une réaction plus virulente de la part de Caesar, mais il n’en était rien… Pas un « espèce d’idiot », ni de « débile pourquoi t’as fait ça ? » ça n’avait pas tant de valeur que ça ? Il n’appartenait pas à quelqu’un d’important de la guilde ? Enfin, tant mieux pour lui s’il n’était pas grondé, il n’allait clairement pas s’en plaindre, ni le faire remarquer. Malgré cette perte, leur situation n’était pas si catastrophique que ça puisque le Lynch sortit une carte de la boîte à gant. Evidemment que ce n’était pas la peine de demander à Kazuki de la lire et de se repérer avec, c’était plus qu’une mission impossible pour lui. Il attendit sur son siège passager, se mettant en position tailleur. Il se contenta de hocher la tête à tout ce que son partenaire lui disait concernant l’itinéraire à prendre. Il pouvait même dire une connerie que le Yaksha l’aurait approuvée ! Toutefois, il ne comprit rien à la suite de son monologue. Une ceinture ? De la confiance ? Les flics ? Le code de la route ? Une bassine ? Se justifier auprès de Mélusine… MAIS ! Il n’avait pas fait de conneries encore ! Du moins, pas à ses souvenirs ! Le bicolore releva à peine son t-shirt de façon à pouvoir voir s’il avait une ceinture à son short, mais ce n’était pas le cas. Puis, il fit pareil à Caesar, sans lui demander son avis, pour savoir s’il en avait une, mais ça ne semblait pas être le cas non plus. Pour lui, une ceinture ne ressemblait pas à une corde… C’était plus beau normalement !
« Pas ceinture et pas bassine. » Il ressortit le pot de mayonnaise et le leva. « Mayonnaise ! »
Kazuki se tourna lorsque Caesar lui montra la fameuse ceinture. Ah d’accord, c’était ça ! C’était une bonne chose de le savoir, il ne disait pas non pour apprendre des choses, mais ça ne lui disait pas comment ça marchait. Il la toucha et finit par remarquer, au bout de quelques essayages un peu hasardeux, qu’elle pouvait s’étirer et qu’un truc bizarre en fer se baladait de haut en bas, mais ce n’était toujours pas clair pour lui. Il se retourna vers l’autre mage noir et lui fit tel un idiot :
« Je comprends pas. »
Cette phrase, il savait bien la dire car il la disait trop de fois. Le jeune homme hocha une nouvelle fois de la tête lorsque Caesar lui demanda si c’était la première fois qu’il montait dans une voiture. Oui, c’était la première fois ! Il était plus marche à pied et footing que de monter sur des objets autant sophistiqués.
Après une heure de route, le duo d’Hydra Roar arriva sur la fameuse plage. Avant de se diriger vers l’épave, qui était plus que visible, Kazuki décida de se dégourdir un peu les jambes en marchant et en faisant quelques étirements. Ce n’était pas une bonne chose de rester assis à ne rien faire dans un véhicule plutôt compact. Ce fut pendant ses étirements qu’il remarqua une silhouette au loin.
« Quelqu’un. »
Et sans prévenir, Kazuki alla vers cette personne. Il ne savait pas qui elle était, mais elle ne devait pas s’approcher, ni rester là. En voyant Kazuki arriver vers elle, la personne fut, d’un seul coup, très enjouée et joyeuse. On aurait dit qu’elle les attendait ?
« Bonjour ! Vous êtes les deux mages ayant répondu à ma demande de quête ? Je vous en remercie ! »
Il prit la main du Yaksha et la secoua vivement. Mais alors que ce dernier avait plutôt l’intention de lui faire faire un vol plané car il prenait ce geste brusque pour une agression, il absorba ses sentiments et ne fit rien. Il sourit grandement et ferma joyeusement ses yeux derrière son masque. Il s’éloigna légèrement de la personne, qui était un monsieur en vérité, et murmura des « content héhé ! »
« Je suis navré, mais je vous assure que je suis ravi de vous voir… » Répondit-il d’un ton neutre. « Je me présente : Filnéas Thune, je suis historien. Vous êtes certainement au courant, mais j’aimerais que vous enquêtiez sur cette épave, il y a de drôles de rumeurs sur elle, et au mieux, de retracer toute son histoire. Je suis sûr qu’elle est incroyable et importante. Je me chargerai de vous récompenser et de vous créditer si j’en fais un livre. - PARTIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIII ! » Hurla joyeusement Kazuki.
Et en quelques sauts, il entra dans l’épave par le trou qu’il y avait sur la coque.
Pas de ceinture et pas de bassine ! Manifestement, il n'avait pas vraiment compris ce que Caesar baragouinait, mais de toute manière le Lynch s'était montré excessif : ils n'allaient probablement pas être vus sans ceinture ni arrêtés de toute façon. Peut-être qu'il avait trop parlé et que Kazuki n'avait pas tout écouté ni même pris cela vraiment au sérieux, et son pot de mayonnaise sorti confirma cette réflexion.
- Je ne sais pas trop si la mayonnaise nous servira, mais si on veut se faire un bon sandwich pourquoi pas, dit-il sans réfléchir davantage à l'intérêt de ce pot de mayo. Quand Kazuki ne comprit pas comment mettre la ceinture, il l'aida et se douta que la réponse à sa remarque était affirmative. Oui, ça se voyait qu'il n'était jamais monté dans une voiture. Caesar se demanda si cela avait un rapport avec son âge, qu'il n'arrivait pas à connaître d'ailleurs. Ce masque n'aidait pas, mais peut-être que Kazuki était très jeune. Il ne jugeait pas sa manière de parler qui était très... minimaliste. Non, il admirait l'économie de mots à laquelle il s'employait, c'était une qualité d'aller droit au but. Caesar fit un léger sourire à Kazuki avant de reprendre la route.
Une heure plus tard, ils étaient arrivés. Ils sortirent tout deux du véhicule. Kazuki, se dégourdissant les jambes au même titre que le Lynch qui fit quelques pas, lui fit remarquer que quelqu'un s'approchait d'eux. Son collègue au masque de renard coupa la distance entre eux en avançant vers l'étranger, qui se présenta d'ailleurs sans tarder, affirmant qu'il était celui qui avait déposé la quête. Kazuki secoua sa main avec entrain, ce qui sembla énerver l'étranger qui d'un coup n'eut plus aucune réaction. Caesar releva un sourcil en voyant Kazuki se rapprocher tandis que la joie de l'homme en les voyant s'était grandement dissipé. Il n'affichait plus qu'une expression neutre désormais. Filnéas Thune, historien, hm intéressant. Ils étaient bien là pour enquêter sur l'épave oui, mais ll ne devait sûrement pas s'attendre à deux mages d'Hydra Roar, qui étaient surtout là pour comprendre comment l'épave fonctionnait, et trouver un potentiel lacrima rare, ou autre artefact, et s'emparer ainsi de ce qui cause les fameuses illusions. Kazuki se précipita vers l'épave en criant, et Caesar afficha un sourire à l'homme qui commenta l'enthousiasme de son collègue.
- Je ne vous le fais pas dire, dit-il sans se départir de son sourire en regardant l'homme. Et bien, ne vous en faites pas, nous saurons respecter les termes du contrat en échange de telles récompenses. Vous ne serez pas déçu, M. Thune, ajouta-t-il en essayant de ne pas rire même si son sourire s'agrandissait dangereusement. Il se tourna rapidement et fit mine d'être pressé de suivre son collègue pour ne pas qu'il le voit exploser de rire à la prononciation de son nom. Décidément, il était entouré de farceurs et n'était pas au bout de ses peines. Caesar suivit Kazuki qui s'était déjà engouffré dans l'épave, qui était finalement bien plus proche de la plage que ce qu'il avait cru voir en arrivant sur les lieux. C'est comme si elle s'était approchée pour les accueillir, mais en fait il n'en était pas bien sûr alors il n'en fit pas cas, étant toutefois sur ses gardes. Il entra doucement dans le lieu, qui était sombre et possédait une odeur d'humidité et de rouille. Personne ne s'était dit qu'il fallait venir la démonter et récupérer les pièces, pour ne pas qu'elle vienne nourrir les poissons ? Ou tout le monde s'en fichait ? Cela dit, peut-être que les gens croyaient les rumeurs et avaient peur.
Caesar n'était pas sûr de s'il fallait appeler Kazuki pour s'assurer qu'il était encore là, mais il ne sentait pas sa présence. Il comptait explorer tout seul ? Ce n'était pas une mauvaise idée de se séparer, mais vu les ténèbres qui emplissaient l'endroit, mieux valait d'abord s'éclairer, se dit-il en sortant une lampe torche de son sac. Il éclaira et vit une silhouette devant lui.
- Ah, Kazuki ! Te voilà, s'exclama-t-il sans pour autant parler trop fort, pour une raison qu'il ne savait pas d'ailleurs, mais il sentait qu'il ne valait mieux pas crier. Ça pouvait faire de l'écho, et même s'il aimait sa voix, il n'avait pas envie qu'elle se répercute sur toutes les parois de l'épave et réveille on ne sait quoi qui pouvait dormir au fond de celle-ci. Superstitieux ? Non, mais parano oui, et très méfiant c'est certain.
Caesar ne comprit pas quand il vit l'endroit s'illuminer d'un coup, sous un ciel gris et une pluie battante, ainsi que plusieurs personnes tout autour de lui disséminées sur le pont. Le pont ? Le pont de l'épave ? Il était plutôt sûr d'être entré par un endroit de la coque. À aucun moment il n'aurait pu être sur le pont puisqu'il aurait fallu grimper une échelle au minimum pour se faire. Et la silhouette qu'il avait vu se dessiner dans le faisceau de sa lampe torche n'était plus là, d'ailleurs. Où était Kazuki ?
Le monologue de Caesar dans le véhicule avait quelque peu perturbé Kazuki qui n’en comprit pas un mot. Il n’avait pas de ceinture, son partenaire de mission non plus après une vérification, n’avait pas de bassine, juste un pot de mayonnaise qu’il avait dû prendre plus tôt. Le deuxième mage d’Hydra Roar lui fit savoir que ce n’était pas certain que la mayonnaise serve à quelque chose sauf s’ils comptaient manger un sandwich à un moment donné. Un sandwich… Kazuki fixa droit devant lui et réalisa qu’il n’avait pas pensé à manger avant de partir. Après, il avait plutôt l’habitude d’avoir l’estomac vide pendant un long moment, Mélusine n’était pas du genre à se préoccuper de son cas, le bicolore ne savait pas comment cuisiner et le cuisinier de la guilde n’était pas tant disponible et aimable. Il tiendrait le coup, ça irait ! Une fois arrivé à destination, le Yaksha eut un peu de temps pour se dégourdir les jambes et s’échauffer. Il finit par apercevoir une personne au loin, qui semblait les avoir remarqués de son côté puisqu’elle se rapprocha d’eux pour venir les saluer et leur expliquer la situation. C’était cet historien qui avait fait la demande de mission… Kazuki ignorait si sa mère était au courant, mais il allait jouer le jeu et se faire passer pour un mage comme un autre… S’il voulait bien arrêter de lui serrer la main comme un fou ! Le jeune homme faillit lui faire faire un vol plané pour le calmer, mais à la place, il absorba tout son entrain, ce qui lui permit de se calmer et de foncer vers l’épave une fois que le commanditaire de la mission termina son explication.
A l’intérieur, Kazuki n’y voyait rien… ça n’avait rien d’étonnant quand on n’avait rien pour s’éclairer. Il tapota le sol de ses pieds pour essayer de se repérer et voir s’il n’y avait pas des passages secrets ou des indices pouvant les mener à leur but. Puis, il regarda en l’air, à droite et à gauche… Il y avait vraiment quelque chose à y faire ici ? Car il n’y avait rien ! Il se retourna vers Caesar lorsqu’il finit par le rejoindre et plissa ses yeux à la vue de la lumière de sa lampe de poche… Ses yeux s’étaient déjà habitués à l’obscurité et cette lumière était comme malvenue même si elle était essentielle pour poursuivre leur recherche. Kazuki avait l’intention de lui voler sa lampe de poche pour prendre les devants, mais à la place, il finit dans un tout autre endroit qui n’avait rien à voir avec l’épave où il était censé être !
Le mage d’Hydra Roar ne le savait pas, mais l’illusion du lacrima commençait. Il se retrouva presque allongé sur un sol bien décoré et luxueux à avoir un mal de tête qu’il n’avait pas à la base. Doucement, il termina de se relever pour ne pas se donner un vertige et vit un monsieur à côté de lui, lui saisissant délicatement le bras et ayant la moue inquiète… Pourquoi il s’inquiétait pour lui ? Ils ne se connaissaient pas.
« Tout va bien ma chère ? » Finit-il par lui demander.
Ma chère ? Kazuki regarda autour de lui et remarqua qu’il se trouvait dans une grande salle avec un plafond très haut, il y avait plusieurs lustres faits d’or et finement décorés avec goût pour éclairer cette salle. Il y avait de nombreuses tables protégées par de belles nappes blanches parsemées partout dans la salle, une belle scène avec un orchestre jouant du classique, un bar à l’opposé et quelques canapés faits en cuir rouge. Ça devait être un restaurant ou une salle de réception ? Enfin, ce n’était pas ce qui importait le plus le Yaksha… En ayant observé cette salle de tous les coins possibles, il avait vu le nombre de personnes à l’intérieur et ce détail le fit paniquer. D’un geste vif, il força l’homme à le relâcher, il tomba sur le sol à cause de sa force, et chercha la sortie dans le but de s’éloigner de cette foule. Cependant, cette action n’arrangea pas l’inquiétude que l’homme portait à son égard et se mettait à le poursuivre.
« Attendez mon amie ! Laissez-moi au moins vous guider à votre chambre pour que vous puissiez vous reposer. » Lorsque Kazuki trouva la sortie et bouscula les personnes cherchant à s’abriter de la pluie, la voix de l’homme se fit d’autant plus forte : « Non, vous ne devez pas sortir, il pleut dehors ! - Pas amis ! Pas pleuvoir dehors ! Vais bien ! »
Kazuki força le passage pour sortir de cette salle, ignorant toutes les personnes râlant sur le fait qu’elle soit malpolie, qu’elle ne s’excuse pas de son comportement et que ce n’était pas digne d’une personne de son rang de courir de la sorte. Pourquoi parlaient-ils de lui au féminin ? Ils n’avaient pas les yeux en face des trous ? Et c’était quoi cette histoire de rang ? Ces personnes avaient deviné quelque chose d’important ? Tout ceci commença à effrayer Kazuki et il se mit d’autant plus à paniquer quand il vit que le monsieur continuait de lui courir après. Pourquoi ne voulait-il pas le lâcher ? Il essaya de le distancer et si Kazuki s’exclama :
« Pas suivre ! » L’autre dit : « Mince alors… Je ne me souvenais pas qu’elle courrait si vite. »
Le Yaksha fut terriblement mouillé par cette triste vérité : il pleuvait dehors et beaucoup de personnes patientaient pour pouvoir rentrer dans la salle dans laquelle il venait de sortir. Mais il lui fallait retrouver Caesar car trop de choses le perturbaient. Il pleuvait alors qu’il faisait beau à la base, il ne voyait plus la terre ferme, il y avait trop de monde sur cet engin et il y avait cet homme fou qui le poursuivait en plus de le prendre pour son ami ! Il lui fallait de l’aide pour se remettre les idées en place et c’était pour ça qu’il lui fallait Caesar, il était beaucoup plus malin que lui !
Après avoir exploré, sans le vouloir, une bonne partie du pont, il finit par voir Caesar au loin. Kazuki fut tellement soulagé qu’il ne fit pas attention, ni à la prévention du monsieur qui lui signala que le sol était glissant, et glissa sur le pont mouillé jusqu’à son partenaire de mission.
« Là ! » Il se releva d’un seul coup, essoufflé au possible, et se planqua derrière Caesar, ne faisant sortir que sa tête d’un côté. « Dangereux et bizarre ! Me suis ! - Ah, je vous rattrape enfin… Qu’est-ce qui vous prend ? Je suis inquiet pour vous. » Il finit par faire attention à Caesar. « Bien le bonjour à vous mon cher, j’ignore si vous êtes au fait, mais à cause de la pluie, nous essayons de mettre tout le monde à l’abri. Voulez-vous bien me suivre ? - CHERIIIIIIIIIIIIII, CHERIIIIIIIIIIIII ! Tu es sorti sans parapluie, tu vas attraper froid par ce temps ! » Fit une nouvelle voix qui finit par les rattraper et donner le fameux parapluie à son chéri tout en perdant son souffle.
Kazuki ne comprenait vraiment rien… Caesar comptait réellement le suivre ?! Ils étaient louches ! Pourtant, à les regarder comme ça, ils n’avaient aucun moyen d’attaquer, ni aucun moyen de se défendre s’ils les attaquaient.
« Qui ?! » Il le demanda presque sauvagement tout en les pointant du doigt. La femme rit nerveusement avant de dire : « Mais enfin… Votre plaisanterie est de mauvais goût ! Nous sommes vos amis. » Elle porta une main au centre de son corps pour se mettre plus en avant. « Je suis Isabelle et voici mon époux : François Alric. »
Alors… Là aussi, c’était une plaisanterie de mauvais goût. Ces personnes avaient un lien avec Mélusine ?! Maintenant qu’il regardait François, il reconnaissait ces cheveux blond platine et les yeux vert émeraude qui caractérisaient tant Mélusine. Il avait l’impression d’en voir sa version masculine ! Son cœur se serra et lui fit mal. Il avait envie de vomir et ce n’était pas forcément qu’à cause du mal de mer… Cette révélation le chamboula intérieurement, il resta focus un long moment sur le nom Alric qui résonnait dans sa tête. Son stress mélangé à la panique le firent respirer plus fortement. Il était tellement mal qu’il s’écroula derrière Caesar en étant à moitié conscient.
Caesar était sur le pont de l'épave, sauf que celui-ci était bien plus neuf et animé que l'image qu'elle renvoyait de l'extérieur. Les personnes venaient d'apparaitre d'un coup, ainsi qu'une pluie battante qui menaçait de le tremper en quelques secondes à peine. Les êtres impromptus qui animaient le bateau avaient transformés la scène, et désormais il était entourés de personnes habillés dans un style ancien et aristocratique. Très élégant ma foi, il se sentait un peu à sa place ! Mais blague à part, cela n'avait rien de naturel. Il comprit rapidement, avec évidence aussi, qu'il devait être sous l'effet d'une illusion, ou bien qu'il avait traversé un portail ou quoique ce soit dans ce style, car il était plutôt sûr que le bateau était "mort" avant d'y entrer et une fois qu'il fut à l'intérieur. Décontenancé mais n'ayant pas le choix que d'accepter sa situation actuelle qu'il espérait temporaire, il chercha Kazuki du regard. Malgré la pluie, il parvenait à bien voir ce qui l'entourait : le pont était vaste, et de la lumière passait dans une salle au loin, à l'abri du déluge qui s'abattait avec fracas sur eux.
Explorant un peu le pont à la fois du regard et avec ses petites jambes, il fut surpris par l'arrivée soudaine, ou plutôt le retour, de son comparse d'Hydra Roar : Kazuki. Il semblait apeuré et désemparé, mais il ne pouvait pas déchiffrer plus que ça son expression car bientôt il fut suivit par un homme. Kazuki lui fit savoir que la personne à sa poursuite était dangereuse et étrange. Manifestement il n'avait pas l'air de comprendre ce qu'elle lui voulait. Caesar fut décontenancé de manière visible lorsque l'homme s'adressa à lui familièrement, comme s'il le connaissait et qu'il s'agissait d'un ami de longue date. Dans un langage des plus soutenus, il lui fit remarquer le plus poliment du monde qu'il fallait se mettre à l'abri et s'il voulait bien le suivre. Les yeux bleus de Caesar le scrutaient avec attention : il ne le connaissait pas le moins du monde, mais quelque chose de terriblement familier se dégageait de ses traits.
Une voix féminine et aïgue les interrompit avant qu'il eu l'occasion de répondre. Son chéri allait attraper froid, mais c'était aussi le cas des deux joyeux lurons d'Hydra Roar. Kazuki parla pour eux en s'exprimant avec un soupçon de férocité, leur demandant de manière simple et rude qui ils étaient. Ce n'était pas très élégant, mais c'était la façon la plus appropriée de demander, car en effet, qui étaient-ils ?! S'il s'agissait d'une illusion, elle était quand même foutrement réaliste. Le courant d'air froid qui passa glaça les os de Caesar et lui fit comprendre à quel point c'était vrai. Ce qu'il ressentait n'avait rien d'illusoire. " Nous sommes vos amis " leur répondit la femme, se présentant elle ainsi que son mari sous les noms d'Isabelle et François Alric. Alric, hm ? Cela ne lui disait rien, mais la femme, au même titre que son époux, donna l'impression à Caesar qu'ils se connaissaient, ou qu'ils s'étaient déjà vus quelque part, mais de manière très vague, comme un visage qu'on aurait croisé pas plus de deux fois sur le même trajet de train.
Le brun, trempé, ne se souciait pas de son état physique. Son regard se portait sur les deux personnes devant lui. Etait-il judicieux de leur faire comprendre qu'ils n'avaient rien à faire ici, qu'ils n'existaient peut-être pas sur le même plan de la réalité, bien qu'il ne s'agisse que d'hypothèses ? Absolument pas, il valait mieux suivre le pas et voir ce qui en découlerait par la suite. Il ne fit pas attention tout de suite à Kazuki, s'adressant aux deux êtres un tantinet familier.
- Mais oui, où avions-nous la tête ? Ce doit être ce froid et cette pluie... Mes chers François et Isabelle, il serait en effet de bon ton d'aller nous abriter avant de couver une sournoise maladie, dit-il en faisant rouler délicatement les mots sur sa langue. Il trouvait ça amusant de parler de manière aussi soutenu sans passer pour un connard arrogant, puisque sinon tout le monde sur le bateau l'était, logiquement, non ? Ah le beau langage, les belles paroles ! Qu'il aimait ça et... Caesar crevait de froid bordel ! Son attention se porta derrière lui lorsqu'il entendit quelque chose tomber au sol. Kazuki semblait livide, et bien à terre à même le froid glacial du pont. Son comparse le souleva du sol, à moitié inquiet et à moitié stressée par la situation qui était des plus inhabituelles.
- Vite, rentrons ! Elle risque de tomber en hypothermie ! s'exclama François. L'utilisation du féminin fit tiquer Caesar, qui ne comprit pas pourquoi il genrait Kazuki au féminin. Après, peut-être qu'il s'agissait d'une fille ? Avec son masque, ça pouvait porter à confusion. Et puis, on était quand même en 1207, il fallait élargir ses horizons. Même si Caesar appréciait les anciennes choses, il n'avait pas envie de juger le progrès : Si Kazuki voulait être une fille, alors c'était dans son droit ! Il eut un petit sourire à cette pensée. Cela alimenta ses théories sur ce qu'il se passait.
Une fois qu'ils furent à l'intérieur de la salle remplie d'un beau petit monde, François les amena dans une plus petite pièce au fond de cette salle, puis il alla leur chercher de longues serviettes pour se réchauffer. Caesar réfléchit et enleva sa veste et ses gants noirs, les posant sur un radiateur qui se trouvait là. Il observa Kazuki allongé sur le seul petit lit de la pièce, emmitouflé dans la serviette. Il ne voulait pas lui enlever son masque, par respect pour lui, mais il toucha son cou pour prendre son pouls qui était accéléré. Sa main froide avait sûrement fait un choc contre la peau de Kazuki. Il espérait qu'il ne prenne pas mal cette intrusion privée, lui-même n'aimait pas qu'on le touche, mais c'était le seul moyen de mesurer son pouls et s'il avait de la fièvre. Manifestement, pour le moment, ce n'était pas le cas. François et Isabelle revinrent dans la pièce après leur avoir laissé un moment seuls.
- Mon amie semble aller pour le mieux. - Me voilà rassuré ! Elle avait pâli d'un coup, mais c'est sûrement le froid qui lui a fait un choc. - Oui, ça doit être ça, répondit Caesar.
L'hypothèse était valide, mais il n'avait pas vu correctement la réaction de Kazuki après les présentations. Est-ce qu'il était choqué de ce qu'ils vivaient ? En tout cas, il n'avait pas comprit et semblait décontenancé, à juste titre puisque Caesar l'était aussi.
- Dites-moi, je me suis endormi lorsque le bateau est parti, en avons-nous encore pour longtemps ? - Oh mais enfin ne soyez pas sot, vous êtes déjà pressé de partir ? fit Isabelle dans un rire jovial. - Isabelle, voyons, ne te moques pas ma chère, la reprit gentiment François, Ne vous inquiétez pas, c'est une journée de détente avec tous nos amis pour inaugurer notre bateau, comme vous le savez. Mais le temps n'est vraiment pas au rendez-vous... Regardez-moi ce ciel noir et cette pluie calamiteuse !
Isabelle changea d'expression en regardant Kazuki, manifestement inquiète. Elle se hâta d'amener un linge humide pour le placer sur son front. Une goutte de sueur coula sur la tempe de Caesar. La serviette mouillée trônait sur le masque de Kazuki, là où était son front plus précisément. Ce geste confirma au mage noir qu'ils ne voyaient pas son comparse comme lui le voyait. La femme toucha les cheveux de celui-ci, et sa main survola le vide, comme si elle caressait de longs cheveux qui reposaient sur l'oreiller. Caesar était partagé entre rire aux éclats et ne rien dire. Il se racla la gorge pour se reprendre.
- Hm oui bien sûr, suis-je bête ! Et il est vrai que cette pluie n'est pas des plus bienvenues ! - Votre compagne semble simplement inconsciente, elle a sûrement besoin de repos.
Le souffle de Caesar se coupa. Sa compagne ? Un sursaut le prit à la gorge : le fou rire menaçait de s'emparer de son être, et dans un violent effort il se contint, se détournant du couple pour cacher son expression. Il toussa fortement ce qui les inquiéta. Ils lui demandèrent si tout allait bien, et le Lynch répondit simplement qu'il avait avalé de travers, que ce n'était rien. Il se reprit à nouveau, c'était beaucoup pour lui. Il fallait qu'il aille enquêter plus en détails et laisser Kazuki de côté pendant que celui-ci reprenait ses esprits, ensuite il lui expliquerait ce qu'il avait compris.
- Nous devrions la laisser se reposer, suggéra Caesar sans dire davantage de mots, ni faire de remarques sur le fait qu'il parlait non-ironiquement de Kazuki comme d'une femme, qui plus est sa "compagne", information qu'il n'avait pas encore complètement digérée.
Il retourna dans la salle accompagné des époux Alric. Scrutant des yeux l'assistance qui bavardait debout ou assis aux tables, mangeait au buffet, buvait des verres au bar, il constata que tous n'étaient pas habillés très élégamment. Certains avaient des vêtements plus banals, plus "communs". Il ne fit pas de commentaire, mais il ne s'attendait pas à une telle variété de personnes parmi les amis des Alric, qui semblaient des plus raffinés et dégageaient quelque chose d'aristocratique. Il se tourna vers les époux qui étaient restés à ses côtés.
- Votre bateau est des plus sublimes. - Oh merci mon cher ami ! Nous l'avons baptisé l'Hydre, de manière à faire comprendre que les Alric sont puissants et déterminés à ne pas se laisser couper la tête ! répondit de manière détaillée François. - J'aime beaucoup cette image, commenta Isabelle.
Caesar fit un sourire en approuvant le couple. Cela lui rappelait le nom de sa guilde, mais l'image de l'hydre était commune et puissante : coupez une tête, et une autre viendra vous attaquer sans relâche jusqu'à ce que vous parveniez à toutes les couper, chose difficile. Le Lynch appréciait également cette image. Mais il ne récoltait pas plus d'infos que ça. Comment sortir de cette illusion, à défaut de pouvoir la comprendre pleinement ? Il se sentait un peu inutile, mais peut-être était-ce de bon ton de profiter des événements jusqu'à attendre une potentielle résolution.
Un grand bruit allait résonner, des dizaines de minutes plus tard, et bientôt l'eau ne serait plus que celle de la pluie. Petit à petit, le pont allait prendre l'eau, mais les occupants du bateau ne s'en rendaient pas encore compte.
Kazuki ne saurait pas expliquer comment il était parti d’une épave pour se retrouver dans une énorme salle de réception luxueuse et accueillant de nombreux convives. Cet amas de personnes réunit au même endroit le fit paniquer, il ne devait pas rester là ! Cependant, un homme l’empêcha, sans réellement le vouloir, de faire ce qu’il voulait. Le Yaksha était loin d’être le Roi des bonnes manières, mais cet inconnu agissait trop familièrement avec lui alors qu’ils ne se connaissaient pas ! Sans réfléchir, le bicolore l’envoya valser et se mit à courir pour s’échapper de cette salle. Ce n’était pas qu’elle puait, ni qu’elle était moche à regarder, mais il n’était pas là à la base et ne comprenait rien à rien. En plus de cette foule monstrueuse cherchant à s’abriter de la pluie, il y avait un autre détail quelque peu perturbant et effrayant à sa manière : l’homme qui s’inquiétait pour lui se mit à le poursuivre, le mettant en garde sur de nombreuses choses… Il n’était plus un enfant ! Mais voilà qu’il suffisait de penser ainsi pour qu’il glisse à cause du pont qui était mouillé sur les quelques derniers mètres qui le séparaient encore de son partenaire Caesar. C’était en partie pour ça qu’il s’était mis à courir aussi, Kazuki devait le retrouver s’il voulait comprendre un minimum ce qui se passait ici !
Le mage d’Hydra Roar mit son collègue en garde une fois qu’il se cacha derrière lui. Le blond qui le poursuivait était bizarre et dangereux selon lui alors il fallait s’en méfier ! Une femme finit par les rejoindre et donna un parapluie à celui qu’elle appelait « chéri ». C’était son prénom ? Il était vraiment bizarre ! Par réflexe, et parce qu’il ne connaissait pas les bonnes manières, le jeune mage pointa les deux inconnus de son index et leur demanda, si on pouvait appeler ça une demande, de se présenter. La femme crut à une mauvaise blague, car ils étaient amis… C’était un mot qu’il n’arrêtait pas d’entendre depuis qu’il était dans la salle, mais Kazuki ne se souvenait pas d’eux donc ils n’étaient pas des amis. Toutefois, la véritable plaisanterie de mauvais goût arriva à partir du moment où elle prononça le nom de famille : Alric. La surprise, la panique, la méfiance, le froid, la pluie, sa nature Yaksha qui avait déjà commencé à absorber les émotions de certains invités, et le début d’un mal de mer… Tout se mélangea, lui retourna presque l’estomac et le cœur en même temps. D’un seul coup, il pâlit et sentit ses forces le quitter. Il ne put plus rester debout et finit par perdre connaissance.
Lors de son repos forcé, Kazuki ne se rendait pas compte de ce qui se passait, mais sa nature Yaksha fit qu’elle continua d’absorber n’importe quel sentiment. Si Caesar parvint à se retenir de rire lorsqu’on lui révéla que dans cette illusion, lui et Kazuki formaient un couple, ce n’était pas le cas du plus jeune qui se mit à rire doucement. Isabelle crut à un réveil de sa part, mais… Non, son amie n’ouvrit pas ses yeux, ce qui fit qu’elle s’inquiéta encore plus. François tenta de la rassurer en lui disant qu’elle devait faire un beau rêve et qu’il ne valait mieux pas la déranger plus longtemps.
De longues minutes plus tard, le mage d’Hydra Roar finit par se réveiller. Son premier réflexe fut de porter une main au niveau de son front pour essayer de soulager l’affreux mal de tête qu’il avait et pour l’aider à la soutenir un peu. Il avait froid, se sentait encore mal et affaibli. Il avait cette désagréable sensation que son estomac était comme une machine à laver et qu’il tanguait au fil de vagues imaginaires. La nausée se présenta assez vite… Très vite même, à un point où il eut à peine le temps de se décaler sur un côté et de relever légèrement son masque qu’il offrit un beau cadeau au sol. Malgré cette libération, Kazuki ne se sentait pas mieux… Cependant, il remit correctement son masque et eut enfin la force de regarder autour de lui pour constater qu’il était à nouveau seul… Ce n’était pas une si mauvaise chose en vérité. Il savait que derrière la porte, il y avait la salle de réception avec toute la foule, il les entendait légèrement, et le fait de se sentir mal comme ça, ça lui faisait repenser à son cauchemar. Voilà qu’il commença à se murmurer des choses qui ne lui appartenaient pas : « pas aimer pluie », « croisière nulle », « où France et Belle ? » Son mal de tête devint trop fort pour lui… C’était tellement douloureux qu’il ne savait plus quoi faire pour qu’il aille mieux et ce n’était pas la serviette posée sur son masque qui allait le sauver… Il ignorait pourquoi quelqu’un l’avait mise là alors que son visage était couvert, cette personne n’était pas maline ! Sa magie ramena son grain de sel en lui faisant lire un brouhaha de pensées… Kazuki se leva du lit, tituba et se cogna une première fois la tête contre le mur… C’était vraiment insupportable ! Alors qu’il allait le faire une deuxième fois, il finit par entendre une pensée plus préoccupante. Il ne savait pas de qui elle venait, mais cette personne semblait inquiète par rapport à un cap à suivre et la boussole qui tournait sans cesse… Incompréhensible pour lui, mais il fallait prévenir Caesar, c’était peut-être une bonne information pour leur mission ?
« Pluie nulle… Alric pas respon… Sable… Aller où ? »
Ça ne sentait pas bon… Kazuki avait l’horrible impression de se faire manger par les paroles des autres et par un tourbillon de noirceur. Tant qu’il le put encore, il bloqua la porte avec tout le mobilier de sa « chambre » et referma tout ce qui fut lumineux. Le Yaksha craignit que son cauchemar ne se reproduise alors il prit les devants en se bloquant, mais ce ne fut pas sûr que ça marche. Il se mit dans un angle de la pièce, se recroquevilla sur lui-même et se boucha les oreilles pour calmer ce brouhaha. Evidemment, ça ne fonctionna pas puisqu’il entendit les pensées aussi. Il ignora totalement Isabelle qui essaya de rouvrir la chambre et qui paniqua rapidement lorsqu’elle n’y arriva pas. Elle demanda à son amie si tout allait bien, la raison pour laquelle tout était bloqué et lui demanda de l’ouvrir.
« Fran- - Attends, pas partir… » Fit comme il put Kazuki. « Prévoir… Pas aimer pluie… Pas responsable… Aller où ? Bien se passer… Plus bruit… Plus lumière… Boussole tourne… Pas bon cap… - Quoi ?! Je ne comprends rien à ce que vous me dites, mais attendez là, je vais chercher votre mari ou François, on va vous aider. - Pas revenir… »
Toutefois, il était trop tard, Isabelle était repartie chercher des secours et n’avait pas entendu la mise en garde de Kazuki, car pour lui, il était trop tard aussi. Il ne restait plus qu’à espérer qu’elle ait compris ce qu’il avait voulu dire par « plus de lumière » et « plus de bruit. » Il l’avait dit pour qu’il évite de se rendre compte qu’il y avait de la vie derrière la porte une fois qu’il perdrait le contrôle de lui-même.
Après s'être séparé du couple, Caesar se renseignait auprès des invités. Que faisaient-ils dans la vie ? Certains étaient banquiers, d'autres comptables, marchands, plus modeste d'une personne à l'autre. On sentait dans cette diversité d'invités qu'il s'agissait de gens qui faisaient vivre le pays, qu'ils soient incroyablement riches ou juste de classe moyenne. Mais tous étaient bien habillés et propres sur eux, il n'avait pas l'impression de voir qui que ce soit de louche ou qui sortait spécifiquement du lot. Alors pourquoi ce bateau était à la base une épave ? Ils avaient sûrement été téléporté dans un autre bateau en entrant dans celui-ci, probablement un espèce de portail qui les avait mené dans une autre partie du monde, ou même une autre dimension pour les théories les plus farfelues. Vu que Caesar avait bravé la mort plusieurs fois, il ne préférait pas douter des pires théories même s'il les prenait toutefois avec un grain de sel.
En fait, tout seul il n'arrivait à rien. Il n'y avait personne de suspect à part lui et son camarade de guilde, qui avaient automatiquement pris une apparence pour correspondre à des proches de ces François et Isabelle Alric. C'est aussi ce qui lui faisait dire que ça ne pouvait pas être un simple portail de téléportation. C'est comme s'ils avaient été projeté dans un film, et qu'ils devaient jouer des acteurs. Mais pouvaient-ils mourir ? Si la pluie était réelle, le froid également, alors la mort pouvait-elle être présente également ? Que ce soit pour les autres résidents du bateau ou bien lui-même, il ne voulait pas le savoir, et n'aimait pas voir des gens mourir devant lui de toute manière. Après tout, à chaque fois qu'il avait essayé de se suicider, il l'avait fait loin des autres pour ne pas imposer une vision traumatisante à qui que ce soit. Alors il n'avait pas envie de voir des trucs glauques !
Sa pêche aux infos étant infructueuse, il savoura quelques mets et canapés par-ci par-là avant de s'enquérir de l'état de Kazuki. Que faisait-il ? Dormait-il encore ? Il sentait qu'il avait particulièrement besoin de lui, non seulement parce qu'ils étaient tous les deux sur cette mission, mais parce qu'il pouvait peut-être comprendre des choses que lui-même ne parvenait pas à discerner, même s'il en doutait très sincèrement. Kazuki avait l'air simple oui, mais il n'était pas forcément simplet. C'est l'image qu'il renvoyait indéniablement, mais sa manière de parler, bourrue et économe en mots, ne devait pas résumer sa personne pour autant ! C'était ce que Caesar pensait, même s'il avait du mal à voir ce que Kazuki pouvait faire de plus que lui. Il vit alors Isabelle accourir vers lui avec une mine affolée sur le visage.
- Tout va bien ? demanda-t-il. - Pas du tout ! Votre amie, elle... Elle a commencé à dire plein de choses incompréhensibles, j'ai pu comprendre "plus bruit" "boussole" "cap", dit-elle avec précipitation sans reprendre son souffle. Il l'enjoignit à se calmer et réfléchit quelques secondes à ses paroles. Elle lui dit d'aller rejoindre son épouse afin d'y voir plus clair, ce qu'il s'apprêta à faire avant de lui suggérer d'aller vérifier avec François si tout va bien concernant leur cap. Sait-on jamais. Il avait le sentiment que si Kazuki avait mentionné à la fois le mot boussole et cap, il devait lui-même s'inquiéter de leur direction et du déroulement du "voyage". Avait-il senti que le bateau tanguait bizarrement ? Le Lynch n'avait pas senti grand chose, mais peut-être que Kazuki avait eu une sensation, que ce soit de l'ordre de l'instinct ou de quelque chose de plus concret. De plus en plus Caesar avait ce sentiment que son camarade allait être bien plus utile à la mission que lui, mais il n'avait aucune idée de pourquoi ni comment.
De retour devant la porte de la cabine, il constata que celle-ci ne bougeait pas lorsqu'il actionnait la poignée et poussait.
- Kazuki ? appela-t-il. Tout va bien ? Tu as le mal de mer et tu te sens mal, c'est ça ? Essaye de boire un peu et de te mettre de l'eau sur la figure, suggéra-t-il telle une mère à son enfant qui faisait une intoxication alimentaire. A deux doigts de lui dire de se faire vomir directement si ça ne passait pas. Caesar avait déjà fait l'expérience plusieurs fois, il préférait tout régurgiter vite fait bien fait plutôt que de crever pendant huit heures dans son lit. Enfin, son esprit divagua quelques secondes sur ce sujet avant qu'il se reconcentre sur la porte, essayant de la défoncer. Ne pouvait-il pas manifester quelques-uns de ses boucliers avec Corrupted Soul pour enfoncer la porte ? Après tout, s'ils pouvaient encaisser des chocs, ils pouvaient très bien défoncer des objets, ça valait bien la peine d'essayer.
Il se concentra un instant et manifesta deux petits boucliers de couleur orangée qu'il fit s'appuyer contre la porte en faisant un geste fort avec ses mains. Heureusement qu'il se sentait en pleine forme. De plus gros boucliers lui auraient demandé plus de force vitale, mais il espérait ne pas en avoir besoin. Il réussit à enfoncer la porte avant de mettre un énorme coup de pied dedans, ouvrant enfin la pièce. Des cris se propagèrent jusqu'à lui avant qu'il ait pu s'adresser à Kazuki qui était potentiellement dans la cabine. A cet instant, c'était le Kazuki de Schrödinger : il pouvait être à la fois dans la pièce et pas dedans qu'il ne savait pas, parce que les cris paniqués prirent toute son attention, la détournant de la pièce.
- De l'eau, de l'eau ! Au secours ! hurla une voix féminine.
Des bruits de course et des cris affolés continuaient, indiquant que la grande salle de réception avait pris l'eau, c'est en tout cas ce qu'il comprit. Caesar se mit à paniquer à la manière des résidents du bateau. Il ne devait pas céder à la panique totale sinon il était foutu. Et Kazuki était probablement encore en train d'être mal en point. D'ailleurs, pourquoi est-ce qu'il n'entendait pratiquement rien venant de la pièce désormais sombre ? Il se tourna vers la porte qui menait à la pénombre.
- Kazuki ... ? appela-t-il hésitant.
En réalité, Caesar ne s'attendait vraiment pas à la suite des événements. Le bateau qui prenait l'eau allait rapidement être le cadet de ses soucis, finalement.
Kazuki avait fait tout son possible pour que son cauchemar ne se reproduise pas. Il avait bloqué la porte avec tout le mobilier disponible dans cette pièce et s’était mis dans l’angle le plus éloigné. Il prit sa tête entre ses mains et murmura de nombreuses phrases qui n’étaient pas de lui. Malgré toute la place que les voyageurs prenaient sans le vouloir, le bicolore parvint à entendre Isabelle et la prévint comme il le put d’une pensée qu’il avait entendue et qui lui semblait importante… Même s’il n’y connaissait pas grand-chose en boussole et en cap. Il lui demanda de ne pas revenir, tout se passait comme ce mauvais rêve et le Yaksha préférait éviter de devenir une machine à tuer.
Il ne lui fallut pas longtemps pour que ce soit le noir total et qu’il ne soit plus maître de lui-même. Cependant, tout irait bien, il s’était bloqué ! Isabelle était repartie retrouver Caesar tandis que François avait reçu un appel via un lacrima de communication et avait dû rejoindre une partie de l’équipage. Ce fut en allant auprès d’eux qu’il put constater de lui-même que la météo était loin de se calmer, que la boussole était déréglée et que même s’ils suivaient un bon cap pour mener sur une terre ferme, jamais ils ne l’atteignirent. C’était étrange ! Mais le pire arriva lorsque le bateau rencontra de force une falaise qu’ils n’avaient pas vue et que les radars n’avaient pas remarquée. La coque fut bien abîmée, ce qui permit à l’eau de s’engouffrer dans le bateau. Tout l’équipage en charge du lacrima au fin fond de la coque fut obligé de s’enfuir, mais l’eau arriva bien plus vite. Des pertes furent déjà à déplorer et l’eau s’infiltra dans la salle de réception à cause de cette foutue pluie qui gagna en intensité !
Dès que les problèmes commençaient à arriver, il y en avait d’autres pour s’ajouter. Caesar fut mis au courant de l’état de Kazuki, qui ne s’arrangeait pas, par Isabelle et décida de défoncer la porte. Il pouvait l’appeler autant de fois qu’il le voulait, le mage d’Hydra Roar n’entendait plus rien. Il vit cette nouvelle lumière, une sorte d’ombre qui la cacha un peu et une vague de panique le submergea. Il avait déjà cédé à toutes ces mauvaises émotions, mais sa nature de Yaksha continua d’absorber l’immense panique de chaque voyageur. Il fallait que ça cesse et pour se faire, il ne cherchait pas loin : il fallait que l’origine de ces mauvaises émotions cesse d’exister. Comme le Lynch était le moins bruyant, Kazuki passa à côté de lui, posa une main sur son épaule et le poussa contre le cadre de la porte. Il y avait mis de la force, mais ce n’était rien comparé à cette première femme qui avait hurlé « de l’eau » par deux fois. Le jeune homme bondit jusqu’à elle, la fit tomber sur le sol grâce à l’élan et à la différence de poids. Il la releva légèrement en la saisissant par le haut de sa robe et envoya son autre poing frapper violemment son visage. Une de moins, Kazuki relâcha le corps, se releva et se tourna vers les autres.
Il y avait eu un blanc lorsque le Yaksha avait frappé cette femme. Le choc était tel que personne ne pouvait agir, ni partir pour sauver leur peau. Les invités ne le firent que lorsqu’ils comprirent qu’ils seraient les prochains. Un ordre de rejoindre les canots de sauvetage fut donné puisque le bateau coulait en même temps. François demanda à tout le monde de garder leur calme et d’y aller de manière intelligente et organisée… Il ne fallait pas que la seule issue de secours de la salle de réception ne soit bouchée parce que tout le monde souhaitait partir en même temps… Ce qui était déjà le cas ! Une deuxième grosse vague de panique et de peur se manifesta et fit vaciller Kazuki. Il ne se contrôlait plus, mais ça restait des émotions négatives en masse, ça n’allait pas le tuer, ni le renforcer. Cependant, ça eut son grand effet néfaste, il prit une nouvelle fois sa tête entre ses mains et grogna. C’était trop pour qu’il absorbe tout ! Bien qu’il soit plongé dans une sorte de folie pour s’en rendre compte, il avait l’impression que sa tête allait céder d’un moment à l’autre. En réaction défensive à tout ce mal, il continua sa boucherie. Cependant, Isabelle comprit qu’il s’en prit aux plus bruyants et se mit à hurler pour attirer son attention. Elle courut dans toute la salle pour l’éloigner des grandes portes, ce qui permit encore à des invités de pouvoir s’en sortir. Ce jeu du chat et de la souris continua longtemps, Isabelle fut très astucieuse et s’aida de plusieurs gros meubles pour mettre des bâtons dans les roues du masqué. A force de se remplir d’eau, le bateau se releva petit à petit, jusqu’à ce que ce soit difficile de tenir normalement debout. Tout le mobilier glissa dont Isabelle, certains voyageurs, Kazuki et les instruments de l’orchestre.
« Bravo, tu m’as rattrapée ma chère… Mais je crains qu’il ne soit trop tard. »
Oui, l'un des instruments arriva à vive allure vers eux. D’une main, le Yaksha tira les cheveux d’Isabelle, lui faisant une nouvelle coupe de cheveux au passage, pour la forcer à se coucher, il se mit au-dessus d’elle pour la protéger et tendit son autre main pour arrêter la course dangereuse de l'instrument. Il ne parvint qu’à la ralentir, celui-ci le cogna vivement, lui cassa la main et la force de l’impact l’envoya contre le mur, qui n’était que quelques centimètres derrière lui. Il perdit connaissance et saigna de la tête, mais au moins, un des problèmes était réglé.
Jusqu'à présent, il avait réussi à afficher une apparence d'aise, de détente, comme s'il était dans son élément, bien qu'ils étaient en terrain inconnu sur une épave qui d'un coup n'était plus une épave, mais un beau bateau avec une foule de gens dessus. Cependant, les choses tournèrent au vinaigre quand il entendit que l'eau envahissait le navire. Il appela Kazuki en essayant de ne pas céder à la panique, mais alors que le silence prenait place, il fut vite brisé par une silhouette qui surgit de la pièce où se trouvait supposément son camarade. Il n'eut pas le temps de comprendre qu'il se fit pousser violemment contre le cadre de la porte qu'il avait précédemment défoncé. Il se releva en grimaçant légèrement, puis il frissonna d'angoisse en voyant Kazuki massacrer la femme qu'il avait précédemment entendu crier, prise de panique. Elle ne pourrait probablement plus être prise de quoi que ce soit à présent.
Ne pas paniquer. Ne pas paniquer. Ne pas paniquer. Quand on a une magie qui vous décuple tout ressenti aussi bien physique que psychique par huit, ne pas s'enfuir en hurlant de terreur dans cette situation était une des choses les plus difficiles à faire pour Caesar. Il se prit la tête entre deux mains sans détacher ses yeux de son camarade de guilde. C'était bel et bien lui. Mais quelque chose avait changé, il le sentait. Il n'y avait pas moyen de voir son expression à cause de son masque malheureusement, mais toute la bestialité s'était ressentie dans la scène à laquelle il venait d'assister. Il l'avait tuée de manière méthodique et surtout, animale. Et il était passé juste à côté de lui, ce qui signifiait que s'il avait crié, il aurait fini dans le même état qu'elle. Enfin bon, Caesar s'en fichait de mourir, mais s'il pouvait éviter de trop souffrir ça l'arrangeait bien.
De la même manière que le Lynch, plus personne n'osa bouger pendant quelques secondes, jusqu'à ce que Kazuki se tourne vers eux. Caesar était en retrait et pas tout à fait dans la salle de réception, donc il était plutôt bien caché des yeux de son coéquipier. Il entendit François conseiller à tous de garder leur calme pour s'organiser efficacement afin de rejoindre les canots de sauvetage. C'était donc acté : ils étaient bel et bien en train de couler. Caesar s'en fichait de mourir, oui, mais la noyade était une des pires morts, et puis qui irait chercher son corps ? Non, vraiment, grosse flemme de mourir comme ça. Il était trop beau pour mourir de cette manière. Imaginer son cadavre tout gris, gonflé par l'eau, le dégoûtait au plus haut point. A part penser à des choses inutiles, il ne savait pas quoi faire dans la situation dans laquelle il se trouvait. Tout le monde vit Kazuki se prendre la tête dans les mains et pousser un grognement, ce qui inquiéta un peu plus Caesar qui faisait tout pour ne pas le montrer ou y penser. Si seulement sa magie lui permettait de lancer des rayons lasers ou des étoiles ou quoi que ce soit d'utile en fait, il aurait pu mettre son camarade hors d'état de nuire. À la place, il le regarda impuissant massacrer un peu plus d'invités.
Ses yeux s'écarquillèrent en le voyant se saisir d'un bébé qui pleurait. Il s'avança avec cette fois-ci l'intention d'utiliser ce que sa magie pouvait lui offrir pour s'interposer, mais Isabelle fut plus rapide. Elle se mit à crier et à courir dans la salle pour attirer l'attention de Kazuki. Caesar prit l'enfant que le masqué avait presque laissé tomber et le donna à ses parents qui s'étaient immédiatement manifestés après l'intervention d'Isabelle. Les autres invités en profitèrent pour désengorger la salle, se précipiter vers les canots de sauvetage, pendant qu'Isabelle se faisait courir après par Kazuki, le mettant en difficulté grâce aux meubles de la pièce. Un si beau mobilier qui finissait abîmé en étant sur la route du masqué. Mais le bateau s'était relevé progressivement, et bientôt, ils allaient couler s'ils ne sortaient pas de là. Caesar aurait pu s'enfuir depuis longtemps et laisser Isabelle et les invités restants se débrouiller avec Kazuki, mais il était impensable pour lui d'abandonner son camarade.
Le mobilier glissa ainsi que tous ceux encore présents dans la pièce. Il lui sembla entendre Kazuki parler à Isabelle, mais il devait d'abord se préoccuper de lui avant d'être bêtement empalé par la harpe de l'orchestre qui fonçait sur lui. Utilisant sa magie, il créa des boucliers qu'il mit au-dessus de tout le monde pour que les instruments et le mobilier restants ne viennent pas les écraser, et soient renvoyés sur les côtés. Il se rendit compte que Kazuki avait pu se protéger tout seul, ainsi qu'Isabelle, et bien qu'il songea à quel point Kazuki était extrêmement fort, il n'eut pas le temps d'y réfléchir davantage, il fallait qu'ils se hissent hors du bateau sinon ils étaient perdus.
- Isabelle, vous êtes réveillée ? appela-t-il. - Votre amie m'a arraché les cheveux, mais sinon tout va bien, répondit-elle. - Il va falloir qu'on remonte jusqu'au pont pour atteindre les canots sinon nous allons tous mourir, dit-il le plus rapidement et intelligiblement possible.
Il s'approcha de Kazuki et le prit sur son dos, heureusement qu'il n'était pas bien lourd. D'une main libre, il utilisa des boucliers comme des plateformes pour remonter, en les plantant dans le sol qui était devenu un mur pour eux. Il fallait se dépêcher. Pour la première fois depuis longtemps, Caesar ne ressentait pas l'envie de mourir alors que ça aurait pu être si simple d'y céder. Mais peut-être que mourir sous l'eau allait simplement le faire revenir à la vie et mourir de noyade en boucle. La perspective n'était pas très enchantante, peut-être que sa motivation à ne pas crever venait aussi de là. Il avait matérialisé pas mal de boucliers depuis le début, alors il était un peu fatigué, mais l'adrénaline de la situation fit qu'il put se hisser tout en haut et aider les invités restants, ainsi qu'Isabelle. Il n'avait pas vu François, peut-être était-il parvenu jusqu'à un canot de sauvetage ? Ils étaient tous sur le pont qui penchait de plus en plus. Bientôt, ils allaient goûter à l'eau salée s'ils ne se dépêchaient pas. Les canots étaient si proches et à la fois si loin.
Un grand bruit retentit dans la coque et le bateau pencha de plus en plus. Ils se précipitèrent sur la barque qui mouillait depuis un moment déjà, en se servant des murs comme appui. Ils remplirent une barque avec leur nombre, tandis que le bateau se renversa complètement. Caesar avait doucement posé Kazuki à côté de lui, le calant près de lui pour ne pas qu'il tombe du canot à son réveil. Sait-on jamais s'il se réveillait brutalement et qu'il passait par-dessus bord à cause de ça. Le Lynch le regarda d'un air songeur. Comment la situation avait pu dégénérer à ce point ? Dans les derniers instants, il avait protégé Isabelle. Que s'était-il passé ?
Une fois que Kazuki perdit le contrôle de lui-même, il fit un massacre. Tous les invités se mettant au travers de sa route, faisant beaucoup de bruit ou ressentant des sentiments négatifs allaient y passer. Tout ce qui l’importait actuellement était le mal être qu’il subissait à cause du fait d’absorber des ressentis qui ne lui appartenaient pas alors il lui fallait les réduire au silence éternel pour s’en sortir. Il ne se préoccupa pas du fait que l’embarcation était en train de couler et qu’elle se relevait petit à petit. François donna l’ordre de s’enfuir grâce aux canots de sauvetage, ce qui n’arrangea pas cette panique générale. Afin de protéger un bébé, Isabelle attira l’attention du Yaksha et fit de son mieux pour l’occuper pour qu’un maximum d’invités puisse s’échapper. Cependant, le bateau fut plus vertical qu’horizontal et tout le mobilier glissa dont les instruments de l’orchestre. De manière instinctive, il sauva madame Alric… Peut-être pour mieux la tuer plus tard, qui sait ? L’impact entre sa main et l’instrument la lui cassa et l’élan de l’objet le fit reculer jusqu’à ce qu’il s’enfonce légèrement dans le mur, perdant connaissance sur le coup et saignant de la tête.
Caesar le sauva en même temps que les invités restants. Kazuki ne se réveilla pas tout de suite. Certains invités demandèrent ouvertement la raison pour laquelle il avait sauvé ce monstre… N’allait-elle pas les tuer sans souci dans un si petit espace maintenant ?! Inquiète, paniquée et stressée, Isabelle tenta de prendre sa défense malgré tout. Elle expliqua que son amie était gentille et devait déjà s’en vouloir. Ils allaient la ramener à la capitale et la justice l’aiderait à se repentir. Elle se tourna vers Caesar, le mari de son amie dans cette illusion, comme pour avoir son soutien et son approbation.
« Toutefois… » Fit-elle plus hésitante. « Je ne savais pas qu’elle… Elle est une Yaksha. »
Son mari lui avait déjà fait lire son livre parlant de ces humains seulement en apparence. Cette force, le fait de perdre connaissance et de devenir semblable à des monstres après avoir rempli certaines conditions allaient dans ce sens. D’un autre côté, elle n’était pas si sûre car jamais elle ne l’avait vue proche, ni sensible à la nature. Un invité, ne voulant pas qu’elle s’en sorte si facilement après ce qu’elle avait fait, fit savoir son mécontentement :
« Yaksha ou pas, ça ne l’excuse pas ! Jetons-la à l’eau tant qu’elle est inconsciente ! »
Isabelle fut prise d’une grosse colère et réduit rapidement les quelques centimètres la séparant de cet homme dans l’intention de le gifler, mais elle ne put pas. Un autre invité sortit une arme magique et commença à la pointer en direction de la tête de Kazuki.
« Faisons un marché madame Alric et vous, son mari. On la sauve à condition que je la récupère, je sais quoi en faire des Yakshas. »
Les vendre une fortune à Bosco certainement, tout le monde pouvait aisément le deviner… Ou les faire se reproduire tant qu’ils le pouvaient pour plus de bénéfices. Isabelle bouillonna intérieurement… Comment pouvait-on faire quelque chose de si inhumain pour gagner de l’argent ?! Les Alric n’étaient pas devenus riches de manière fourbe, elle le savait ! Ni les Fiore, ni les Widsom, ni les Aétios ! Or, cet homme étant armé, elle ne pouvait pas bouger, la balle partirait bien plus vite que n’importe quelle magie défensive.
Doucement mais sûrement, le bicolore retrouva ses esprits. Il se sentit encore affaibli et complètement à l’Ouest. Seuls ses yeux furent ouverts, il n’avait plus la force de faire quoi que ce soit. Pour le moment, il était dans le déni… Il valait mieux ça que d’accepter que cette tuerie et sa première dans l’enfance étaient réelles… Ce choc serait trop important pour qu’il puisse tenir mentalement et dans une situation si catastrophique, c’était le pire à éviter. Difficilement, il se tourna vers Caesar… Il semblait aller bien, Isabelle aussi mais… Il manquait François ! Ce dernier jouait un rôle majeur concernant sa propre existence ! Kazuki n’avait toujours rien compris à cette situation et ne savait pas si elle pouvait impacter son futur, mais il fallait qu’il ait François face à lui, sain et sauf ! Il était face à ses arrières voire arrières arrières grand-parents donc au mieux, bien qu’il ne soit pas du tout intelligent et malin, il pouvait supposer qu’ils avaient fait un voyage dans le passé.
« France… Où ? »
Cette question fit comme un tilt dans la tête d’Isabelle. Elle se saisit rapidement de son lacrima de communication et lui hurla dessus dans l’espoir que François réponde via le sien. Aucune réponse pour le moment, elle paniqua une nouvelle fois et hyper-ventila. Elle s’élança vers Caesar, oubliant le fait qu’un invité pointe une arme en direction de Kazuki, et lui demanda plusieurs fois de faire quelque chose pour lui avec ses plateformes ! Il pouvait retourner dans le bateau sans souci avec ça !
« Le connaissant… Il a dû essayer de sauver l’équipage en charge du lacrima qui est au plus bas du bateau. »
Cette partie de l’équipage avait été la première à périr, il n’y avait pas de doute là-dessus. Elle espérait que François l’avait compris, il ne pouvait plus rien pour eux et avait décidé de faire demi-tour… Il y avait peu de chance… Cet homme était très gentil, borné et devait culpabiliser, il s’était sûrement mis en danger pour tenter l’impossible.
« Chercher France ! »
Suite à cette déclaration de Kazuki, trop brusque à son goût, l’idiot au pistolet le menaça et lui ordonna de ne pas bouger. Le mage d’Hydra Roar le fixa en restant immobile. Il savait, grâce à ses pensées, que la peur l’empêchait de tirer. Certes, il voulait ce profit, mais il suffisait d’un faux pas face à ce « monstre » pour que sa vie prenne fin. De plus, il tremblait tellement que sa visée serait impactée, il n’avait pas envie de tuer un ami de monsieur Alric. Il l’avait aidé à de nombreuses reprises, il ne pouvait pas lui rendre la pareille ainsi… Sauf pour vendre un Yaksha, qui aimait les Yakshas de toute façon ? Surtout un Yaksha ne sachant pas se contrôler, ni faire attention aux autres ! Personne ne lui en voudrait, hein ? Cependant, cette longue hésitation et introspection permirent à Kazuki de passer derrière lui et de lui donner un coup pour l’assommer. Son manque d’équilibre, son mal de mer revenant et sa fatigue le firent tomber, sur le canot de sauvetage, il regarda Caesar pour lui dire :
« Sauver France ! » Malgré le masque, ses yeux lui demandèrent de le prendre quand même avec lui.
Caesar fut étonné de voir que même maintenant, Isabelle continuait de prendre la défense de Kazuki. L'amener à la justice était son idée, digne d'une femme noble et droite comme elle. Le Lynch sourit en entendant cette suggestion. Oui, ils allaient tous sagement aller à la justice, pas de souci ! Il n'en était aucunement question. Quand Kazuki serait sur pieds, ils allaient assommer les invités et les Alric pour disparaître sans laisser de traces. Toutefois, l'entente du mot Yaksha fit lever un sourcil à Caesar. Comme beaucoup de gens, il avait lu le conte très populaire parlant des Yaksha, ces créatures humanoïdes qui vivaient loin des humains, et ayant la capacité d'absorber les émotions positives comme négatives, à leur insu. Il n'avait toutefois jamais considéré la possibilité qu'ils puissent être autre chose que fiction. Isabelle semblait y croire, et après tout peut-être avait-elle des raisons de le penser. Des caractéristiques étaient semblables dans le comportement et la force physique de Kazuki, mais il s'agissait là d'une pure interprétation. Il pouvait très bien avoir perdu le contrôle à cause de sa magie, que Caesar ne connaissait d'ailleurs pas. Il ne fallait pas écarter toutes les possibilités au profit d'une qui pouvait arranger les uns et les autres. Un invité se contrefichait d'ailleurs de son avis et suggéra qu'il valait mieux se débarrasser d'"elle", sa douce compagne masquée bien entendu, quand ils le pouvaient encore. Caesar comptait s'exprimer pour leur dire qu'il n'était pas super chaud à cette idée, puisqu'il avait quand même toujours Kazuki calé près de lui, mais Isabelle était défenseuse des droits humains et Yaksha désormais. Enfin, elle aurait pu s'exprimer davantage si un invité n'avait pas décidé de pointer son arme sur Kazuki. Voilà maintenant que ce dernier proposait un marché pour le sauver, s'il avait le droit de le récupérer.
- Si vous voulez mon avis, dit Caesar doucement, l'idée n'est pas bien folle, n'oubliez pas que l'on parle de ma compagne alors ça serait bien que vous baissiez votre arme et arrêtiez de paniquer comme ça. Vous n'êtes même pas sûrs de ce que vous prétendez, il serait de bon ton de pouvoir confirmer vos hypothèses farfelues avant de vous décider à emporter cette jeune femme et la faire disséquer dans un pays voisin, vous ne croyez pas ?
L'homme soupira, approuvant Caesar d'un regard sans pour autant baisser son arme. Il était juste à côté de Kazuki, alors s'il pouvait éviter de se rater et le viser lui, pour découvrir qu'il ne mourrait pas et donc finir disséqué à la place de son camarade, ça serait bien. Bien évidemment, même si le Lynch pensait ça, il ne comptait nullement laisser Kazuki entre les mains de qui que ce soit tant que celui-ci était dans l'incapacité de se défendre. Il lui devait au minimum ça. Aujourd'hui, aucun membre d'Hydra Roar n'allait mourir ou disparaître, il s'en faisait la promesse. D'ailleurs, son partenaire de guilde s'éveilla doucement de l'inconscience, demandant où se trouvait France... François, il supposa. Isabelle sembla comme se réveiller et essaya d'appeler son conjoint dans un lacrima de communication, sans succès. Elle paniqua et s'approcha de Caesar avec hâte.
- Faites quelque chose, avec vos plateformes nous pouvons sûrement retourner sur le bateau pour le rejoindre !
C'était dans l'optique où, premièrement, le bateau n'était pas déjà complètement trempé et qu'il était encore possible de s'y trouver sans sombrer dans ses bas-fonds où se noyer à cause de son instabilité, et deuxièmement, si François était suffisamment suicidaire pour y être resté au lieu de s'enfuir comme tout le monde avec les derniers invités. Mais Isabelle évoqua une autre information très intéressante pour eux.
- Le connaissant… Il a dû essayer de sauver l’équipage en charge du lacrima qui est au plus bas du bateau.
À tous les coups, tous ceux qui avaient eu le malheur de rester dans les sous-sols du bateau avaient péri, alors à quoi bon ? Il lisait sur le visage d'Isabelle un espoir tacite que son mari n'avait pas eu cette mauvaise idée. Si Caesar avait songé au fait qu'ils puissent tous être morts depuis un moment, alors François y avait sûrement pensé aussi. Cet homme était manifestement très intelligent. Kazuki s'exprima dans un langage des plus simples : un verbe et un prénom, celui de François, affectueusement nommé France comme toujours par le jeune homme au masque de renard. Caesar sourit, tandis que l'homme à l'arme à feu lui somma de ne pas bouger. Il avait bien trop peur à son goût pour quelqu'un qui tenait l'objet de ses inquiétudes en joue. Qui avait vraiment l'avantage ici : l'homme armé, ou Kazuki qui était des plus imprévisibles pour tous ici ? Le Lynch ne se départit pas de son sourire. La tournure des choses était terriblement intéressante. La confusion palpable qui se lisait sur le visage de l'homme fut assez pour voir que, non seulement, sa prise sur son arme faiblissait, mais qu'en plus Kazuki en profita pour se faufiler derrière lui et le faire dormir rapidement. Ce dernier défailli, retombant sur ses jambes. Il eut le temps de demander à nouveau directement à Caesar cette fois-ci de sauver l'époux Alric. Le brun cru lire dans ses yeux une supplique, celle de l'amener avec lui, et il était de toute évidence obligé de s'exécuter. Il n'allait pas laisser Kazuki se défiler de la mission juste parce qu'il avait un peu mal à la tête et était fatigué, sûrement pas ! Il n'avait pas envie de faire tout le sale boulot. Les invités et lui échangèrent de place pour qu'il reprenne Kazuki à côté de lui, et alors il s'adressa à Isabelle.
- De toute évidence, il faut qu'on retourne près du bateau pour voir ce qu'il en est. François ne peut pas être bien loin. Isabelle acquiesça, tandis qu'un invité vociféra. - Quoi ? On ne peut pas y retourner, vous êtes fou ?! Au diable François, on ne peut pas risquer nos vies alors que nous avons réussi à nous mettre à l'abri. - Au diable François, hein ...? dit Isabelle d'une voix sourde de colère. Après tout ce qu'il a fait pour vous vous le jetez quand ça vous convient ? Vous êtes le pire, le pire ! L'invité baissa la tête, réalisant le poids de ses paroles lâches. Caesar soupira. Après tout, il n'avait pas tort, ils allaient se mettre en danger alors qu'ils avaient pas mal galéré à sortir du bateau, mais bon, il parlait beaucoup pour quelqu'un qui s'était fait sauver par les autres ! - Je suis désolé, j'ai seulement... peur... répondit l'invité d'une voix triste, ce qui calma la colère d'Isabelle. Elle semblait comprendre et ne l'en tint pas rigueur. Se saisissant d'une rame, elle donna la seconde à l'invité pleurnicheur. - Puisque vous regrettez, ramez donc ! s'exclama-t-elle. Décidément, Isabelle avait encore beaucoup de force pour quelqu'un qui avait dû littéralement fuir la mort, et était encore dans l'incertitude de savoir si son mari était en vie ou non. Les deux individus ramèrent pour retourner auprès du bateau, dans le silence de mort des invités restants qui n'avaient rien dit et seulement observé les scènes qui s'étaient déroulées sous leurs yeux, le silence de Caesar, de Kazuki qui était évanoui, et de l'imbécile au pistolet qui dormait un peu trop paisiblement à son goût dans un coin du canoë. Les idiots avaient la belle vie décidément.
Arrivant au bateau, qui était désormais voué à être grignoté par l'eau, son bâtiment, sortant à moitié de l'eau, était désormais entre la verticale et l'horizontale, mais plus proche de la première. Plus tard, il reviendrait à l'horizontale, trempant à moitié dans l'eau, sans jamais couler complètement, et s'échouerait progressivement vers le bord de la plage de la partie ouest de Fiore, mais pour l'instant, ce n'était pas encore l'épave que Caesar connaissait et dans laquelle il avait accédé plus tôt dans la journée avec son camarade de guilde. Évidemment, il avait compris qu'il s'agissait d'une autre époque, ou bien d'une autre dimension comme il l'avait précédemment pensé, mais il était persuadé que ce qu'il vivait avait pour origine une magie. Il était enclin à revenir vers le bateau aussi dans l'idée de savoir le fin mot de ce qu'ils vivaient, lui et Kazuki, car la clef de cette histoire était forcément dans le bateau, et forcément cette salle où se trouvait un lacrima avait les réponses. S'en éloigner n'avait pas de sens. Mais il n'était toujours pas sûr de s'ils pouvaient y mourir ou non, alors mieux valait rester extrêmement prudent.
- Naviguons autour du bateau, il y a peut-être moyen de voir à l'intérieur s'il reste des personnes, ou si des gens rodent autour en canoë. Nous devons être vus, dit Caesar. Isabelle et l'invité ouin-ouin s'exécutèrent, tout le monde semblant approuver le brun aux yeux bleus. Il savait que ses mots étaient pertinents, donc pas la peine de contester l'évidence-même ! Ils naviguèrent et furent interpelés par une voix qui appela à l'aide. Isabelle, manifestement pressée, rama comme si sa vie en dépendait et bientôt, ils furent proches d'un trou dans la coque bien visible. Un invité ainsi que François étaient apercevables dans ce trou.
- Il a la jambe coincée sous une poutre, je n'arrive pas à l'enlever, l'eau va prendre si on ne fait pas vite, cria l'invité pour résumer rapidement la situation. Il semblait terrifié. Caesar grimaça. S'ils ne se dépêchaient pas, François aurait probablement la jambe broyée, en plus de l'eau qui allait effectivement probablement reprendre d'assaut le bateau pour en finir avec lui. Quelle idée d'être retourné sous le bateau, d'ailleurs ! Ils mettaient leur vie en danger de manière totalement inconsidérée.
- Je vais y aller, mais il va falloir faire vite, ils ont de la chance que l'eau n'ait pas complètement prise grâce au trou dans la coque, dit Caesar à l'attention des occupants du canoë. Ce dernier était tout proche, ce qui permis au Lynch de se rapprocher et sauter dans le trou.
- Ne vous en faites pas François, je vais vous libérer.
L'époux Alric avait le visage plein de sueur, et grimaçait de douleur. Caesar matérialisa des boucliers sous un bout de la poutre pour la faire bouger, et failli lâcher en entendant François hurler. Mais ça va pas de crier comme ça ? Il avait presque accéléré le broiement de sa jambe, décidément, il ne fallait pas lui faire des frayeurs comme ça. Le brun retint un soupir tandis que la poutre était dégagée et que François pouvait être désormais bougé.
- Tout va bien ? cria Isabelle. Elle voyait bien que son mari était libéré, mais elle avait quand même besoin d'être rassurée, ce qui était normal après tout. Caesar allait répondre que oui, mais une grosse secousse se fit ressentir dans la salle. Un grand bruit secoua tout le bateau qui s'enfonça un peu plus dans l'eau. Était-ce parce qu'ils avaient bougé la poutre ? L'équilibre du bâtiment dans lequel il se trouvait était-il donc si fragile pour qu'ils accélèrent sa supposée descente vers les abysses simplement de cette manière ? Caesar souffla. Il fit signe à l'autre invité de se dépêcher tandis qu'il prenait François par l'épaule. Il les poussa hors du trou, quitte à ce qu'ils risquent de se noyer en tentant de sortir, car bientôt, ils n'auraient plus d'air avec l'eau qui s'infiltrait à toute vitesse. Isabelle n'avait qu'à nager ou leur jeter une bouée pour les récupérer, ce n'était que quelques mètres vers la surface. Juste quelques mètres, rien d'insurmontable.
Caesar ne pouvait pas savoir ce qu'il allait advenir des deux hommes, puisque lui-même n'avait pas eu le temps de sortir du trou. Bientôt, l'air allait manquer, et bientôt, il allait sombrer. Son esprit était embrumé par la fatigue, qui l'appelait à prendre un peu de repos bien mérité après tant d'effort.
Doucement, mais sûrement Kazuki reprit ses esprits. Il ne chercha pas à savoir où il se trouvait, ni ce qu’il était advenu des nombreux invités. Il fut forcé de faire un travail colossal sur lui-même pour ne pas céder à la culpabilité ni aux mauvaises pensées. Il commençait à comprendre que, contrairement à ce que lui avait dit Mélusine par le passé, ses massacres n’étaient pas des rêves, mais belle et bien la réalité. Cependant, la réussite de leur mission restait plus importante et était trop compromise par cette situation catastrophique. Pour ne pas arranger les choses, François n’était pas présent et ça inquiétait le Yaksha ainsi que sa femme Isabelle. Si cette dernière le fit savoir ouvertement et agit dans le but d’aller le secourir ou plutôt… De demander à Caesar de le faire pour elle comme il était un mage, le bicolore était bloqué à cause d’un invité qui pensait qu’il était un Yaksha pouvant lui rapporter gros s’il faisait un petit tour à Bosco.
Kazuki n’avait rien suivi de l’histoire ou de la dispute, il n’aurait rien compris dans tous les cas. Il attendit le moment opportun pour venir assommer par derrière celui qui le menaça avec son arme magique. Une fois cela fait, il tomba à genoux à cause de la fatigue et du mal de mer lui retombant dessus. Il essaya de demander à Caesar de sauver François et de le prendre avec lui, mais son regard ne se fit pas assez convainquant comme il partit tout seul.
« Ah ! » S’exclama-t-il en bondissant difficilement et légèrement vers le bord de la barque tout en tendant sa main vers son partenaire de mission comme pour essayer de l’attraper, en vain.
Tout comme Isabelle, Kazuki se sentit impuissant en tant que simple spectateur, mais il en avait déjà assez fait… A un point où son corps lui fit comprendre en l’empêchant de se bouger comme il le voudrait. C’était frustrant et rageant ! Il lui suffirait de sauter pour rejoindre Caesar et sa force ferait le reste ! Mais son corps ne le voulait pas et son mental n’était pas assez fort pour qu’il puisse se surpasser. Le Yaksha resta assis sur la barque et regarda dans la direction où le Lynch était parti, attendant son retour avec François. Cependant, le bateau finit par prendre l’eau plus rapidement et la salle, où semblaient se trouver monsieur Alric et le mage illégal, finit sous les flots. Kazuki se pencha pour essayer de voir quelque chose, mais entre le mauvais temps et l’eau salée étant forcément grisée, il ne put rien voir. Il mourrait d’envie de se jeter à l’eau et s’élança par plusieurs fois pour tenter quelque chose mais… Il ne savait pas nager. Le jeune homme grogna contre lui-même, sachant pertinemment que s’il tombait de la barque, il serait un boulet à sauver.
Peu de temps après, François remonta à la surface avec l’aide de l’invité qui s’était trouvé à ses côtés depuis tout ce temps. Ils levèrent un bras pour faire signe de leur jeter une bouée de sauvetage, chose que fit directement Isabelle, plus que ravie de savoir que de nouvelles vies étaient sauvées grâce à Caesar et sa magie. Cette bouée étant simplement reliée à une corde solide, Kazuki tira dessus pour les remonter sur leur barque comme s’ils ne pesaient rien.
« Il faut que j’y retourne ! » Commença François. A peine sauvé et dans un piteux état, il voulait porter secours à celui qui venait de le secourir. « Il est bloqué, il ne peut plus revenir ! - Mais t’as vu l’état de ta jambe ?! Je m’en occupe ! »
Le couple se disputa un court laps de temps pour savoir qui allait secourir Caesar. Puis, au bout d’un moment, Isabelle ne chercha plus à comprendre, ni à avoir le dernier mot, et se jeta dans l’eau. En apercevant la réaction choquée et plus qu’inquiète de François, Kazuki ne réfléchit plus, il retira son masque et le posa sur la barque. Une fois sous l’eau, le masque le gênerait ou le Yaksha le perdrait. S’il s’amusait à revenir sans, Mélusine lui ferait plus regretter que si seul Caesar voyait son visage. Il mit sa peur de côté et plongea à son tour… Non, mais vous avez vraiment cru qu’il a fait un beau plongeon ? Il a fait son meilleur plat ! Il nagea très maladroitement vers Isabelle, qui était bien plus rapide que lui.
« Attendez-moi… » Entendit Isabelle directement dans sa tête.
Elle fut choquée et se retourna pour voir que son amie avait décidé de la suivre. C’était rassurant d’avoir quelqu’un pour l’aider mais… Sa nage ne la rassura pas bien longtemps. Elle dut perdre du temps à venir la chercher pour ensuite aller secourir Caesar. Toutefois, la femme de François connaissait la force de son amie et savait qu’elle gagnerait du temps pour débloquer le trou où était coincé le second mage d’Hydra Roar. Elle se contenta de la guider le plus rapidement possible vers cet endroit, laissa Kazuki débloquer le trou presque sans souci… Du moins, c’était l’impression qu’il donnait car il était bon pour ne rien extérioriser. Enfin, il sortit Caesar, le tint et aida comme il put Isabelle à la nage car son collègue semblait trop fatigué pour. Une fois à la surface, les rôles s’inversèrent, ce furent les invités qui jetèrent la bouée de sauvetage, tirèrent sur la corde pour ramener le trio et le hissèrent sur la barque.
« Va bien ? » Demanda Kazuki à l’attention de Caesar, lui tapotant doucement la joue comme pour essayer de le tenir éveillé.
On aurait pu croire que son premier réflexe aurait été de remettre son masque, mais les événements étaient trop stressants et la santé du Lynch était bien plus importante que cacher son visage moche. Bizarrement, dès que ce sauvetage fut plus ou moins réussi, la pluie se calma doucement et la météo commença à s’éclaircir. Des premiers petits rayons du soleil frappèrent sauvagement les yeux de Kazuki qui dut mettre un bras devant pour les protéger un peu.
Il tenta de donner du courage, l’envie de se relever et d’aller mieux à Caesar. Il n’était pas faiseur de miracles, ni mage de soin donc il fit comme il le put, mais les paroles pouvaient être fortes quand elles le voulaient. En remarquant que les rayons du soleil étaient plus présents qu’avec son masque et qu’il voyait mieux autour de lui, il s’empressa de récupérer son masque pour le remettre… C’était ni vu, ni connu, pas vrai ?!
Caesar était fatigué. Il avait rarement été aussi épuisé, même après de longues journées de travail et peu de repos. Il avait trop utilisé sa magie, qui menaçait déjà son énergie vitale s'il l'utilisait trop. Alors après ces longues heures depuis l'arrivée sur l'épave, il était des plus rincés, et ce n'était pas qu'à cause de l'eau qui remplissait petit à petit le peu d'espace qu'il occupait. Il ne savait pas si c'était à cause du manque d'air progressif mais il commençait à voir flou, à avoir du mal à respirer. Peut-être faisait-il une crise d'angoisse en raison de la situation catastrophique dans laquelle il se trouvait. Il était peu aisé de résister à la panique quand le contrecoup de votre magie consistait à tout ressentir huit fois plus intensément. Il était des plus pitoyables, il le savait. Il sombrait doucement dans l'inconscience, tandis qu'il réalisait qu'il allait mourir de la manière la plus douloureuse qui puisse être.
Un train lui était déjà passé dessus, alors se faire happer et sentir ses membres se déchirer violemment, il y avait déjà goûté, et ne le recommandait pas spécialement. Mais bien qu'il n'avait pas encore essayé de mourir brûlé, on disait de la noyade qu'elle était assurément la pire des morts. Cependant, personne n'en était revenu pour raconter son vécu, n'est-ce pas ? Il serait le premier à pouvoir le faire ! Si un jour il survivait à sa triste existence, ainsi qu'à tous les périples qu'un immortel comme lui était obligé de traverser, et s'il parvenait à se débarrasser de sa malédiction sans y laisser la peau, il serait bien tenté d'écrire une biographie des plus épicées. Il ferait un chapitre spécial pour cette pétasse de Mélusine, et clôturerait sur Nathaniel pour finir correctement ses mémoires. Peut-être parviendrait-il à le décrire comme il le voyait, digne de l'obsession qu'il lui portait ? Il imaginait son visage alors que ses yeux se fermaient petits à petits, mais bientôt ce visage fut remplacé par un autre qui ne lui était aucunement familier, mais bien réel. Il se sentit trainé dans l'eau, puis monté.
Ah, on était venu le secourir. Ou alors, c'était ce que ça faisait d'arriver en enfer ! Peut-être qu'il s'agissait des âmes des damnés qui le tourmentaient le temps qu'il ressuscite pour retourner au véritable enfer qu'était sa vie. Il aurait presque cru qu'il s'agissait de ça, mais à moitié dans l'inconscience, il sentit tout de même une main tapoter sa joue, tandis qu'on lui parlait, semblerait-il. Cela eu pour effet de le réveiller plus efficacement, puisque apparemment le tirer et le hisser sur la barque n'avait pas brisé son délire de façon efficiente. Il ouvrit difficilement les yeux, avant de tousser violemment, crachant de l'eau sur le côté. Juste un peu, histoire de dire qu'il avait douillé et failli sentir la violence d'un début de noyade. Il redressa son buste et le soleil l'aveugla. Il vit Kazuki qui était manifestement en train de remettre son masque. Quoi ! Il avait tout raté ! C'était la seule occasion de voir son visage et il avait été assez empoté pour être en train de sombrer dans le coma. Il était plutôt dégoûté, mais il ne comprenait pas pourquoi il l'avait enlevé. Il savait qu'il n'avait pas mal vu : le masqué était bien en train de se re-masquer, passant d'ex-masqué à de nouveau masqué, c'était un fait ! Vu qu'il n'avait pas encore réussi à crever, même un peu, il comptait bien lui en toucher deux mots ! Non mais !
Caesar passa une main sur son visage, décollant les cheveux qui lui ceignaient le visage. Il était trempé. Heureusement, le soleil venait enfin les réchauffer et les réconforter après cette après-midi catastrophique.
- Oh seigneur ! Merci, merci, merci d'avoir sauvé mon mari ! s'écria Isabelle en s'approchant de lui après qu'il ait repris ses esprits. Elle prit ses mains dans les siennes et le regarda en pleurant presque de soulagement. - De... rien, dit-il, surpris par l'émoi soudain. - Heureusement que votre compagne était là, vous vous seriez sûrement noyé sinon. Elle m'a bien aidé à dégager la coque pour vous extirper de là. Il regarda en direction de Kazuki à l'entente de ses mots, et après quelques secondes lui offrit un de ses plus beaux sourires, bien qu'ils l'étaient tous, sincèrement reconnaissant. - Merci Kazuki de m'avoir évité de mourir noyé, puis de revivre, puis de remourir noyé, eut-il envie de dire, mais personne n'aurait compris. Et puis, ils auraient pu mettre son corps en terre, pas forcément le laisser sombrer. Du coup il serait mort noyé, puis aurait ressuscité, serait mort étouffé sous terre, puis ressuscité, rincez et répétez. A la place, il dit plutôt : - Merci à toutes les deux. Il retint un sourire un peu moqueur pour le mégenrage imaginaire de Kazuki. Ravi que tout le monde s'en soit sorti.
Il avait encore de la difficulté à parler, et était toujours aussi épuisé, et ça se voyait bien qu'il essayait de garder la face. De toute manière, lui, Kazuki et Isabelle étaient les plus grandes forces de la nature ici. Les autres occupants de la barque occupaient la place de figurants à côté d'eux : Lui et sa magie, Kazuki et sa force colossale, et Isabelle et sa résilience couplée à sa détermination de sauver tout le monde. Ils faisaient un trio des plus légendaires, digne du "Trio Météo" composé de Rayquaza, Groudon et Kyogre ! On me dit dans l'oreillette de ne pas parler de Pokémon dans un RP Fairy Tail, oui bah désolée faut bien que je mette en avant les persos quand ils sont stylés hein bon. Revenons-en à nos moutons, et bien qu'ils ne soient pas très laineux, ils étaient des plus intéressants ! Bref, toujours est-il que Caesar n'en menait pas large et était rincé.
- Nous allons rejoindre le rivage et appeler des secours, dit Isabelle.
Le Lynch avait envie de s'effondrer dans la barque et dormir pendant que le soleil lui caresserait chaudement le visage, mais il fallait qu'il reste éveillé au cas où tout n'était pas fini. Cela dit, après un temps qui lui parut bien trop court, ils arrivèrent sur la plage. Caesar descendit en premier.
- Merci pour tout Isabelle et François. J'espère que vos finances iront pour le mieux malgré le naufrage de votre sublime Hydre. - Ne vous inquiétez pas, tout ira pour le mieux, j'en suis sûre.
La voix d'Isabelle toujours si douce lui répondit, et alors qu'il se retourna pour lui faire un sourire, il ne vit plus personne dans la barque, à l'exception de son camarade de guilde.
Le sauvetage de Caesar fut une bonne chose de faite. De retour comme il le fallait sur la barque, Kazuki ne remit pas directement son masque et fit comme il put pour réveiller son partenaire de mission. Ce n'était pas une chose aisée lorsque l'on n'était pas un mage de soin et qu'on ne connaissait rien des premiers secours. Il tapota doucement sa joue et essaya de l'encourager via quelques mots. Voilà que le brun se mit à tousser violemment et à recracher toute l'eau qu'il avait pu avaler. Il reprit ses esprits et parvint à se relever comme si rien ne lui était arrivé finalement ! Maintenant que tout allait pour le mieux, il était temps de se jeter sur son masque pour le remettre. Le retour du Soleil lui avait fait remarquer qu'il avait dû le retirer pour se jeter dans l'eau et qu'il n'avait pas le droit de le retirer... Mélusine le lui avait interdit. Pendant un court instant, une panique intérieure s'empara de lui... Pour l'illusion, il s'en fichait, il avait plus ou moins compris qu'il n'avait plus la même apparence, mais Caesar semblait le voir normalement... Du coup, avait-il vu quoi que ce soit ? Que devait-il faire si c'était le cas ? Le tuer pour être sûr que Mélusine ne le tue pas derrière ? Non, Kazuki avait déjà fait assez de mal comme ça, moralement il tenait à peine alors s'ajouter un fardeau ne ferait que le détruire une nouvelle fois.
D'ailleurs, par pensée, le Lynch le remercia de l'avoir sauvé pour lui éviter une mort répétitive. Euh... Comment ça ? Le Yaksha ne comprit rien et ne put pas lui répondre. S'il répondait, il comprendrait qu'une magie lui permettait de lire ses pensées et PERSONNE ne devait le savoir, surtout pas Mélusine qui en profiterait grandement ! Déjà qu'elle profitait de lui, il ne fallait pas lui donner une raison supplémentaire ! Lorsque le remerciement se fit à voix haute, Kazuki détourna sa tête pour cacher ses rougeurs alors que ça ne servait à rien puisque le masque le faisait déjà, se recoiffa pour gagner à nouveau quelques centimètres sur sa toute petite taille pour un homme de son âge... Même s'il ne savait pas quel âge il avait ! Il hocha la tête lorsque Caesar fit savoir qu'il était ravi que tout le monde s'en sorte... Ouais, tout le monde c'était vite dit, n'avait-il pas fait un massacre précédemment ? Pour ça, il avait entendu dire que ce serait réglé une fois de retour sur la terre ferme. Le bicolore ignorait quelle femme il représentait dans cette illusion, mais il s'excusa intérieurement, il allait la mettre dans une sale histoire.
Dès que la barque se remit en route pour atteindre le rivage, le mal de mer le frappa de plein fouet. De va bien, il passa à pas bien du tout ! Il s'affala sur le bord de l'embarcation, François s'occupa de le retenir pour qu'il ne tombe pas dans l'eau, et essaya de respirer calmement. Pourquoi se sentait-il si mal ? Pourquoi semblait-il être le seul ? Il y avait tant de choses que le jeune mage ne comprenait pas ! Pour le trajet en voiture ça allait, mais dès qu'il était question d'un autre moyen de transport qu'il n'avait jamais connu jusqu'à présent, c'était terminé ! Ce dernier trajet fut un véritable calvaire ! Si son estomac était vide et ne pouvait plus rien recracher, son foie menaçait à tout instant de lui faire passer ce mal être un court moment. Heureusement, l'arrivée sur la terre ferme se fit avant ! Au lieu de poser normalement ses deux pieds sur le sable, Kazuki eut l'impression de continuer à tanguer et tomba d'un seul coup pour venir embrasser le sable. Il ne se releva pas directement comme cette sensation continua encore.
Au bout d'un moment, le mage d'Hydra Roar finit par se remettre debout et se tint la tête. Ça tournait encore, mais pas assez pour qu'il ne puisse plus tenir debout. Il constata qu'il n'y avait plus personne autour d'eux... Alors c'était officiellement fini ? Le paysage changea à nouveau pour qu'ils se retrouvent à l'intérieur de l'épave, là où ils se trouvaient avant que l'illusion ne commence. Cet endroit lui parlait plus !
« Ah... Retour ! »
En quelques petits bonds, il se dirigea vers le fond de la salle où ils se trouvaient. Ce n'était pas les restes de la salle de réception puisqu'ils étaient plus bas actuellement. D'après les mémoires de sa carte intérieure lors de l'illusion, ils étaient au même niveau que le gros feu follet qu'il avait aperçu... C'était sûrement le lacrima qui avait permis au bateau de bouger, mais qui avait permis à cette illusion de prendre forme aussi ! Kazuki déplaça quelques débris, retira une certaine épaisseur de mousse et dut défoncer une porte pour se retrouver face au lacrima qui... Ne ressemblait plus qu'à un énorme cristal comme il s'était vidé tout seul de sa magie. Il cassa un petit bout pour qu'il serve de preuve auprès de leur client et auprès de Mélusine aussi. Pour le client, la mission serait une réussite, mais pour Mélusine... Il allait falloir faire preuve d'un énorme courage pour se présenter devant elle avec un lacrima vidé de toute magie. Le Yaksha sortit à peine de la salle que le client arriva, plus que ravi de pouvoir enfin mettre les pieds dans cette épave !
« C'est incroyable ! Vous avez réussi mes amis ! Je peux visiter cette épave sans risque maintenant. » Filnéas Thune se plaça face à Caesar, les yeux brillants et désirant d'en savoir plus sur cette épave. « Alors, alors ? Qu'avez vous appris ? Que puis-je mettre dans mon futur livre ?! »
S'il en savait trop sur la famille Alric, ce n'était pas sûr qu'il puisse revenir chez lui pour écrire ce fameux livre pour rendre hommage aux victimes du naufrage... Ou de la tuerie d'un Yaksha...
À la surprise de Caesar, le décor changea encore. Les invités, Isabelle et François avaient disparus de la barque, puis le paysage avait également disparu pour qu'ils se retrouvent lui et son coéquipier à l'intérieur de l'épave. Cela lui sembla si peu familier au début qu'il ne comprit pas tout de suite où il se trouvait. L'Hydre était beaucoup moins resplendissante désormais. Son camarade s'était aventuré plus loin, et un grand bruit lui indiqua qu'il cassait quelque chose. Il devait sûrement chercher ce qui avait causé tout ça, que ce soit un objet magique ou autre. Il se présenta à lui au même moment que le commanditaire de la mission s'était pointé, sûrement attiré par le bruit. Il semblait heureux de pouvoir fouler le sol de l'épave sans risque, et souhaitait savoir ce qu'il pouvait mettre dans son livre.
- Attendez, l'illusion était si réelle que nous avons du mal mon camarade et moi à comprendre tout ce qu'il vient de se passer.
Kazuki avait montré un bout de ce qu'il semblait être un lacrima qu'il venait de récupérer. Le client sauta de joie.
- Merveilleux ! Allez, maintenant que ça va mieux dites-moi tout s'il vous plaît !
Caesar fronça les sourcils, très agacé, mais répondit à sa requête. Progressivement, son agacement s'envola. Il lui parla de François et Isabelle Elric mais omit absolument tous les détails concernant ce qu'il s'était passé avec Kazuki, puis comment ils avaient galéré à sauver François, et puis ensuite lui-même. Il avait changé le "Alric" en "Elric" car il avait eu le sentiment qu'il valait mieux brouiller les pistes. Lui-même ne comprenait pas trop ce qu'il s'était réellement passé et avait l'impression que ce qu'ils avaient fait dans l'illusion n'avait rien changé à la réalité historique du naufrage de l'Hydre.
- L'Hydre... Les Elric... C'est terriblement fascinant ! Vous avez pu les voir mourir, et le bateau a coulé... Comment avez-vous fait ? - Et bien, vous savez, on a pu s'extirper à temps et remonter sur un canot de sauvetage, mais beaucoup d'invités n'ont pas eu cette chance !
Ensuite, il embrouilla son attention en décrivant la richesse du lieu et la beauté des ornements, de la vaisselle et de la réception en général. Le client buvait ses paroles en répétant par moment "C'est formidable, oui formidable !". Il leur demanda ensuite leur nom et leur affiliation.
- Je veux vous créditer pour vous remercier, en plus des jewels ! - Ce n'est pas la peine, nous sommes juste deux mercenaires intéressés par les mystères, et aussi l'argent bien sûr ! ajouta Caesar en jetant une œillade à Kazuki. Vous êtes bien sûr toujours libre de décrire à quel point je suis beau et éloquent, et mon camarade plein de fougue et trépidant, c'est bon pour l'image ! finit-il en plaisantant.
Le client avait eu ce qu'il voulait, et les mages d'Hydra Roar l'argent ainsi qu'un bout du lacrima. Cette mission était un succès. Le trajet du retour se fit sans encombre. Caesar était épuisé et il sentit que son collègue aussi. L'illusion était bien trop réaliste, ils en ressentaient physiquement les conséquences bien qu'il ne s'agisse que de la fatigue et pas des blessures. Une fois de retour dans la forêt, presque aux portes de la guilde, Caesar intima d'un geste à Kazuki de s'arrêter, avant de lui chuchoter quelque chose.
- Je ne dirais rien de ce qu'il s'est passé, et ce même si Mélusine menaçait de me couper une couille. Tu peux me faire confiance là-dessus, dit-il avec un petit sourire secret.
Kazuki comprendrait très certainement de quoi il parlait, mais Caesar avait encore beaucoup d'interrogations. Que ce soit cette histoire de Yaksha lancée à la dérobée par un invité, cette perte de contrôle sanguinaire, et les capacités physiques hors-normes de son camarade avec qui il partageait ce secret. Il savait bien que personne dans la guilde n'était au courant, sinon personne ne le traiterait comme un chien. Le Lynch voyait avec des yeux observateurs le traitement qu'il subissait, et bien qu'il n'en faisait rien car rarement à la guilde, et peu soucieux des autres tant qu'ils se laissaient faire, il savait et voulait soutenir Kazuki qu'il connaissait désormais un peu mieux. Peut-être était-ce là une expérience propice à l'ouverture de leurs carapaces bien fermées, mais c'est surtout un autre problème pour un autre jour.
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