[SANS MAGIE] L'histoire d'un rapport | PV : Caesar
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Kazuki
Membre d'Hydra Roar
Ven 16 Juin 2023 - 2:32
L'histoire d'un rapport
Au moment de la mission et des explications de Caesar à leur ancien client, Kazuki fut surpris qu'il brouille autant les pistes. Elric au lieu de Alric, il n'entrait pas dans les détails de l'illusion et divaguait même sur l'intérieur du bateau, qui n'était plus qu'une épave maintenant. Le Yaksha était, parfois, content de se retrouver avec un masque tout le temps sur son visage sinon il aurait fait planter le plan du Lynch en un temps record. Sur le trajet retour au quartier général de la guilde, les deux restèrent silencieux. Kazuki n'était pas doué pour faire la conversation comme il avait du mal à comprendre ce qu'on lui disait et à s'exprimer. Il ne savait pas si c'était dû à l'illusion, au manque de nourriture, à sa perte de contrôle, où il ne saurait pas encore dire si c'était vrai ou faux, ou au temps qui avait pu passer, mais il se sentit affreusement fatigué, finissant par s'endormir car il n'avait plus la force de lutter contre elle. Ainsi, le trajet lui parut très court et rapide. Caesar le réveilla une fois arrivés proche de la guilde. Puis, il lui dit qu'il ne dirait rien même si Mélusine le menaçait de lui couper une couille... Une couille ? Qu'est-ce que ça pouvait être ? Un objet de valeur comme il l'avait mentionnée et pas autre chose !
Si ce dernier s'occupa de cacher le véhicule appartenant à la guilde, le bicolore vérifia qu'il avait le bout de lacrima avec lui. C'était la preuve de la réussite de leur mission auprès de leur client, mais pour Mélusine, ce serait une toute autre histoire. Elle devait s'intéresser à ce lacrima et à ses capacités magiques, mais maintenant, il n'était plus qu'un bout de cristal, que ce soit en période avec magie ou sans magie. En parlant de sans magie, Kazuki n'entendit plus les pensées de Caesar ce qui n'était pas bon à savoir... Comment allait-il mieux s'en sortir face à quelqu'un ?! Pour Mélusine, ça ne changeait pas grand-chose, jamais il ne pourrait la lire, mais pour les autres membres de la guilde ? Bon... Ce n'était pas comme s'il restait collé à eux et il n'en avait pas le droit. Caesar avait été l'exception parce que sa mère lui avait donné l'ordre de partir avec lui, ce serait sûrement la première et la dernière fois. Il ne fit pas du tout cas du fait que les deux avaient été chanceux de se sortir de cette illusion avant que la période sans magie ne se manifeste. A peu de choses près, ils auraient été soit tués à cause de ce changement brutal de période ou, au mieux, sortis de force. Cependant, le Yaksha n'était pas malin au point de réaliser de telles possibilités.
Le mage d'Hydra Roar connaissait l'obscurité du quartier général en période sans magie et décida d'aller chercher des Luminicioles. Ce n'était pas compliqué d'en croiser dans cette forêt et les membres la connaissaient bien maintenant. Ils savaient où en trouver pour s'éclairer le chemin. Kazuki en captura deux au hasard, faisant très attention à ne pas les écraser. Il ne saurait même pas se l'expliquer, mais que ce soit les plantes, la terre, l'eau, l'air et les animaux, il se sentait extrêmement bien en leur compagnie et proche d'eux d'une certaine façon. Ensuite, il était temps de descendre ce long escalier en colimaçon pour se diriger vers le bureau de Mélusine. Ils ne croisèrent personne sur leur route parce que personne n'aimait le quartier général en période sans magie. Seule Mélusine avait son bureau éclairé par des lampes, marchant avec des piles, qu'elle avait achetées. Kazuki regarda Caesar, lui demandant silencieusement s'il était prêt à faire face à cette femme, avant de toquer à sa porte. Il ne toqua pas comme on pouvait le voir habituellement. Il se servit de ses ongles et avec sa force, ça fit un bruit aussi fort que quelqu'un qui toque normalement, mais ça faisait un son différent, plus aiguë. Ça permit à la non mage de savoir que c'était son propre fils qui se trouvait derrière cette porte.
« Entrez. »
Ce ton froid... Kazuki ne l'aima pas et se sentit déjà impuissant. Il entra le premier, baissa son regard comme un chien culpabilisant de ne pas avoir pu se retenir et se décala pour qu'elle voit que Caesar l'accompagna aussi. Il n'y avait qu'un siège face à son bureau et le jeune Yaksha savait qu'il n'était pas pour lui.
« Ici et pas bouger. » Ordonna-t-elle sèchement à Kazuki.
Cette place, qu'elle pointa brièvement du doigt, si proche derrière elle signifiait une chose pour lui : il devait entrer en mode garde du corps face à... Caesar ? C'était perturbant de passer d'allié à potentiellement devoir le tuer si elle le lui ordonnait... Là, tout de suite, il... Ne... Pourrait... Pas... Le... Faire... ? Elle invita à peine plus cordialement au Lynch à s'asseoir face à elle et à lui faire le rapport de la mission, sans omettre de détails et sans lui mentir. Et aussi...
« Pourquoi avez-vous rapporté ce vulgaire caillou ? »
On ne pouvait pas tromper ses émeraudes, qui fixèrent ce vulgaire caillou d'un dégoût non camouflé. Que ce soit en période avec magie ou sans magie, l'actionnaire n'avait aucun mal à se rendre compte que ce lacrima était, totalement, dénué de magie.
Ils étaient rentrés de mission et purent constater que le quartier générale d'Hydra Roar était vide et sans lumière. Les deux constatations allaient ensemble : personne ne voulait trainer dans ce trou à rats de base, alors sans luminosité, c'était encore pire. La magie était à nouveau limitée. Capricieuse, elle ne réservait son usage qu'à ceux qui le méritaient réellement. Caesar ne souhaitait pas faire partie de ces gens qu'on nommait sobrement, ou pas, des "élus". Il se foutait de pouvoir utiliser la magie. Après tout, il était à Hydra Roar pour que la magie disparaisse complètement, au moins des mains de l'Homme, alors ce n'est pas lui que ça allait déranger.
Non, ce qui le dérangeait, c'était ce qu'il allait se passer à présent. Tout le monde le savait, en rentrant de mission, il fallait faire son rapport le plus rapidement possible pendant que c'était encore frais, même si la plupart le faisait par écrit. Cela concernait surtout les grosses missions, comme la leur par exemple. Mais lui, Caesar, n'avait pas le luxe de faire les choses simplement en les écrivant. Non non, Mélusine adorait qu'il lui dise tout de vive voix. A une occasion, il avait senti dans son regard qu'elle lui disait "Comme ça, tu ne peux pas me ni****" avec toute cette vulgarité que cette femme lui inspirait. Pour la première fois, un rapport oral n'allait pas se faire seul, mais en présence de son acolyte avec qui il venait de tisser un lien, en tout cas plus particulier que celui de random camarade de guilde comme il pouvait en avoir déjà une dizaine.
Cela n'allait rien changer, il restait à l'aise et serein. Mais est-ce que la vérité qu'il avait déjà prévu de dissimuler allait être mise à mal par les interventions de Kazuki ? C'était une inconnue qu'il prenait en compte. Il était prêt à prendre les coups, mais espérait toutefois que Mélusine n'allait pas essayer de le tuer si elle comprenait qu'elle était bernée, car elle risquait bien de réussir en cette période où Caesar n'avait plus sa magie. Oh, tant pis, mourir n'était pas si dommage en réalité.
Le bureau de Mélusine était le seul constamment éclairé, comme une lumière pleine d'espoir dans la nuit noire, sauf que celle-ci menait en réalité dans la fosse aux lions. Il voyait le visage masqué de Kazuki dans la pénombre désormais plus dissipée par la luminosité du lieu qui éclairait le couloir. Son camarade le regarda comme pour s'assurer qu'il était prêt, et il lui fit un petit sourire qui se voulait rassurant, même s'il ne pouvait pas voir de réponse sur son visage. Avec ses ongles il gratta la porte de Mélusine, ce que Caesar trouva étrange mais il n'en fit pas cas. Une simple invitation à entrer leur parvint, froide et sèche, caractéristique de la harpie qui régnait en ces lieux. Kazuki entra la tête baissée, faisant place ensuite à Caesar. L'ordre qu'on exigerait seulement d'un chien s'adressa manifestement à l'un d'eux, et à la réaction de Kazuki, le Lynch savait que ça ne lui était pas adressé. Il l'avait déjà compris, puisque Mélusine ne lui parlait pas exactement comme ça, même si on en était pas bien loin par moment, quand il entrait dans son bureau.
Toutefois il cacha son étonnement de voir Kazuki traité ainsi. Ce dernier avait-il honte que Caesar le voit ainsi, comme un chien de garde ? Le commerçant regarda droit devant lui, ses azurs ancrés dans les sublimes mais froides émeraudes de la reine d'Hydra Roar. Kazuki se posta derrière Mélusine, et le brun failli esquisser un mouvement de recul devant le tableau qu'il avait devant lui : Mélusine et son garde du corps qui était prêt à attaquer si quelque chose de fâcheux se passait. Elle l'incita à s'asseoir sans se départir de son manque total de cordialité. Etait-elle en colère ? Mieux valait ne pas la titiller même s'il en avait terriblement envie. Il s'assied et immédiatement elle exigea des réponses sur pourquoi ils n'avaient ramené qu'un caillou de leur mission.
- On ne s'attendait pas à ce que le lacrima soit vide une fois sortis de l'illusion, dit-il simplement pour introduire son rapport de mission. Il était parfaitement détendu et avait joint ses mains pour les poser sur ses cuisses, se tenant droit tout de même avec élégance. Il avait attirée son attention avec son introduction, et se retint de faire un petit sourire quand les yeux verts l'incitèrent à en dire plus d'un simple regard insistant. - Nous avons inspecté l'épave et avons alors été pris dans une illusion extrêmement réaliste de ce qui a mis le bateau dans cet état. Nous avons ainsi pu apprendre qu'il s'agissait d'un bateau personnel d'une riche famille ayant vécu il y a plus de cinquante ans. Le bateau a perdu le contrôle et percuté un glacier, déchirant la coque et lui faisant prendre les eaux rapidement. Nous avons pu monter dans des canoés tandis que l'illusion continuait à se dérouler. La majorité des invités sur le bateau sont probablement morts. - Oh, tu as vu des gens mourir Caesar alors ? dit-elle d'un ton mielleux comme si on parlait à un enfant. Continue, ajouta-t-elle rapidement et bien plus froidement. - Nous avons pu rejoindre la plage, toujours dans un canoë de sauvetage, et en touchant le sol nous avons constaté que le canoë avait disparu derrière nous. En retournant dans l'épave, il n'y avait qu'un gros lacrima déchargé. - Donc, si je résume bien, à part des informations sur un bateau qui n'est rien d'autre qu'une attraction pour les plus curieux, et un lacrima vide, vous n'avez rien à me dire ? avait-elle conclut avec une voix méprisante, et qui s'était chargé progressivement de colère. - Je ne sais pas trop ce que vous attendiez mais manifestement il n'y a rien d'autre à ajouter, répondit Caesar avec une voix nonchalante. - Ne prends pas tes aises comme ça avec moi Caesar ! Arrête de faire le malin !
Elle venait de hurler sa colère, faisant valser tout ce qu'il y avait sur son bureau. Le Lynch resta assis. Il était un peu stressé de se faire engueuler, mais ne le montra pas. Il devait attendre que l'orage passe, ça faisait parti des désavantages d'être un mage de cette guilde, et, pire encore, une connaissance de cette vipère. Il jeta un oeil à Kazuki. Que faire ? Et si elle lui demandait de s'en prendre à Caesar pour passer sa colère ? Le Lynch était aussi au fond de lui effrayé, car la situation commençait à partir en vrille comme souvent avec Mélusine, puisque le contrôle ne dépendait que d'elle. Il n'avait pas peur de Kazuki, mais... si son camarade de guilde était réellement capable de faire ce qu'il avait vu dans l'illusion de l'épave, alors il ne donnait pas cher de sa peau.
L'atmosphère changea drastiquement une fois à l'intérieur du bureau de Mélusine. Kazuki n'aimait pas du tout ça, ça allait forcément mal se terminer avec elle. Il se contenta de lui obéir et de se mettre derrière elle tel un garde du corps pour ne pas la froisser plus qu'elle ne l'était déjà. S'il faisait tout ce qu'elle demandait, tout irait bien pour lui et pour Caesar, c'était ce qu'il souhaitât le plus en son fort intérieur. Son partenaire de mission fut invité à s’asseoir et à commencer le rapport. Derrière son masque, le Yaksha se pinça les lèvres lorsqu'ils parlèrent des morts... Bien évidemment qu'il y en avait eus et pas seulement à cause de la noyade... La culpabilité le rongea encore et il baissa une nouvelle fois sa tête. Le rapport ne fut pas long puisqu'il n'y avait pas grand-chose à dire de plus, Caesar avait bien résumé ce qui s'était passé et ce n'était pas sûr que certains détails l'intéressent contrairement à l'historien. Cependant, la façon de dire déplut à l'actionnaire qui monta rapidement dans les tours... Oui, ça allait réellement mal se terminer...
Le bicolore ne put pas retenir un sursaut lorsqu'elle envoya valser tout ce qu'il y avait sur son bureau. Il hésita à commencer à ramasser le tout parce que s'il ne le faisait pas maintenant, elle lui demanderait de le faire une fois que le Lynch ne serait plus là donc il voulut prendre de l'avance en quelque sorte... D'un autre côté, elle semblait trop énervée pour qu'il puisse prendre des initiatives donc, finalement, il changea d'avis et attendit la suite. Le fait d'avoir vidé son bureau ne calma pas la femme, elle n'aimait vraiment pas le fait que Caesar la prenne de haut et avait l'impression qu'il ne lui avait pas tout dit. Elle avait cette irrésistible envie de le remettre à sa place pour qu'il ne s'amuse plus à recommencer et de lui faire regretter, mais avant, il fallait être certaine que le rapport du brun soit correct.
« Caesar, retournes-toi et ferme les yeux. » Elle attendit qu'il le fasse et se tourna vers Kazuki. « Retire-le et regarde-moi. »
Ah... C'était foutu ! Hésitant et doucement, il retira son masque une fois que Caesar ne pouvait pas le voir. Il regarda Mélusine, mais c'était rapidement insoutenable pour lui donc il dévia son regard et sa moue montra qu'il n'assumait pas du tout. L'Alric connaissait le Yaksha, c'était elle qui lui avait donné vie et savait pertinemment ce que voulait dire cette réaction. Kazuki avait toujours peur d'elle, c'était une bonne chose à savoir, mais Caesar n'avait pas tout dit et vu comment les iris du plus jeune tremblaient, il avait fait quelque chose de grave. Elle n'eut pas de mal à faire le rapprochement entre sa nature Yaksha et le fait que ce bateau, appartenant à une riche famille, avait dû avoir de nombreux invités à son bord. Même s'il ne la regardait plus en face, Mélusine continua à le fixer pour lire son regard et essayer d'en savoir plus.
« Tu peux le remettre, ta tête me dégoûte. »
Le remettre était bien plus simple pour Kazuki que de le retirer. Il soupira intérieurement, se disant que ça allait passer, elle n'avait pas réagi plus que ça, elle allait leur demander de partir, n'est-ce pas ? Un petit silence s'installa puis elle s'assit de nouveau sur son siège pour faire face à Caesar. Elle esquissa un sourire confiant, mais malsain en même temps.
« Dis-moi Caesar, t'es-tu, en quelque sorte, attaché à Kazuki ? Ou éprouves-tu une sorte de sympathie ? Ou est-ce de la pitié ? » Elle attendit sa réponse pour renchérir avec une autre question : « Sais-tu ce qu'est un Yaksha ? »
Ces questions pouvaient paraître étranges et quelque peu hors sujet, mais c'était fait exprès. Mélusine s'amusait actuellement, elle voulait faire durer pour que le stress monte et rire de leur position de faiblesse. Elle voulait les voir moins confiants et sereins. Elle ricana sinistrement car elle seule savait ce qui se passerait une fois que cette question aurait sa réponse.
Les accès de colère de Mélusine étaient des plus imprévisibles. On ne se rendait pas compte du contraste possible tant qu'on était pas en face de la chose. L'inattendue monstruosité dont elle pouvait faire preuve était aux antipodes de l'image toujours mesurée de femme parfaite qu'elle était en public. La requête dont elle lui fit part était aussi dans cette veine-là. Se retourner et fermer les yeux. Il était sur un siège, alors il se releva et se positionna derrière la chaise, dos à elle et Kazuki. Mieux valait s'exécuter, faire le rebelle n'avait aucun intérêt et plus vite ils faisaient ce qu'elle leur demandait, plus vite ils en finissaient avec ce rapport de mission.
Il l'entendit ordonner à Kazuki de retirer quelque chose et de la regarder, sûrement son masque présuma Caesar. Il comprit alors que la relation entre ces deux-là était certainement complexe, et aussi intime puisqu'elle lui ordonnait d'enlever ce qui couvrait son visage en permanence. Avait-il seulement déjà fait attention à ces détails-là ? Il ne connaissait pas Kazuki, il se fichait des membres de Hydra Roar de manière globale, mais il était observateur. Il avait aussi bien constaté au cours de leur mission que son camarade de guilde faisait son possible pour ne jamais découvrir son visage et pour parler le moins possible. Il supposait désormais que tout ceci était dû à Mélusine, mais il n'avait aucun moyen d'en comprendre davantage. Il comprit toutefois que Kazuki pouvait potentiellement dévoiler la réalité derrière leur mission. Mélusine ne pouvait pas faire flancher Caesar, même en lui criant dessus, car il était trop bon menteur. Il avait appris de la meilleure en même temps.
Donc elle allait s'en prendre à Kazuki ? "Ta tête me dégoûte." l'entendit-il dire à Kazuki. A cet instant, Caesar ne ressentait pas grand chose en dehors de cette petite frayeur déplaisante de s'être fait engueuler, mais si la magie était active, il aurait sûrement eu quelques sueurs froides et aurait déglutit d'angoisse à cause de son Corrupted Soul qui décuplait ses ressentis. Et à raison : Mélusine était effrayante et dégoûtante. Des années passées à ses côtés ne changeaient pas cette angoisse qu'elle pouvait lui faire ressentir. Il était devenu très bon pour le cacher, mais le coeur ne mentait pas, lui.
Il se retourna quelques secondes après sa phrase, et après qu'il ait bien compris qu'elle s'était elle-même rassise, il put se rasseoir à son tour. Elle ne lui avait pas donné l'autorisation explicite de se retourner à nouveau, mais ce geste lui avait fait comprendre qu'il en avait le droit. Avec un sourire malsain, elle le regarda. Il jeta un oeil rapide à Kazuki derrière elle, masqué, et donc indéchiffrable, même dans son maintien. Tous les éléments qui composaient ce tableau étrange criaient à Caesar qu'il n'avait aucun contrôle sur la situation, et c'était fort déplaisant. Elle lui demanda : s'était-il attaché à Kazuki ? Éprouvait-il de la sympathie pour lui ? De la pitié ?
- C'est mon camarade de guilde et nous travaillons ensemble pour servir les buts d'Hydra Roar, répondit-il directement comme si c'était naturel. C'est un élément qui est très important pour la guilde et qui sait faire le travail, et je respecte beaucoup cela. Il ne mentait pas, c'était des faits. Mais aurait-il dit ça de n'importe qui dans la guilde ? Mélusine avait instillé une part de sa personnalité dans l'éducation de Caesar, dire qu'il était presque comme son enfant n'était en aucun cas un euphémisme. Il savait dire aux gens ce qu'ils voulaient entendre, et elle n'en attendait pas moins de lui. Un bon discours bien servi et surtout ne pas oublier pourquoi il était là, pourquoi ils étaient tous là : pour Hydra Roar. Elle lui demanda ensuite s'il savait ce qu'était un Yaksha. Caesar n'afficha aucune expression, ni sourire insolent, ni mine déconfite à l'entente de ce nom qu'il avait déjà entendu au cours de la mission de l'épave abandonnée, de la bouche d'un invité.
- Ce sont des créatures humanoïdes qui vivent en communauté loin des humains, et qui peuvent absorber les émotions négatives et positives. J'ai lu le conte qui en parle. - Ce n'est pas juste un conte. Les Yaksha sont réels et existent bel et bien. Ce sont des créatures fantastiques à la force et à l'empathie... littérale, comme tu le décris.
Caesar regarda Mélusine droit dans les yeux. Il fit mine de ne pas comprendre.
- Quel est le rapport avec la mission ?
Mélusine soupira légèrement, avançant ses coudes sur son bureau, son menton trônant sur ses mains jointes.
- Il y a bien un rapport avec la mission Caesar, mais dans le fond, tu sais déjà de quoi je parle. Il serait de bon ton d'arrêter de me prendre pour une idiote, souffla-t-elle avec un air dangereux et une voix plus grave, sonnant comme un avertissement. - Je ne comprends vraiment pas de quoi tu parles, dit-il presque en regardant sur le côté, comme quand quelqu'un dit un truc gênant, mais se retenant de le faire, car elle verrait un peu trop qu'il la prend effectivement pour une débile. Caesar jubilait intérieurement, mais il était aussi légèrement inquiet. Elle avait compris, mais à quel point ? L'expression de Kazuki sans son masque avait-elle été si parlante ? Et de toute façon, quelle importance cela avait-il si Caesar savait qu'il était un Yaksha ? Il n'allait pas le lui piquer, il n'était déjà pas très chaud pour le contrarier d'ailleurs après ce qu'il avait vu.
Un poing s'abattit violemment sur la table. Celui, manucuré et à la peau souple, de Mélusine. Elle en avait assez et son expression affichait une rage contenue. Avait-elle tant que ça le contrôle sur la situation ?
- Je vous envoie en mission sur une épave particulière, toi et lui, dit-elle en le désignant d'un doigt rageur, se retournant à moitié sur le concerné qui était toujours derrière elle, et tu me dis que vous n'avez rien à me donner à part ce caillou ?
Le lacrima vidé fut saisi d'une main par la furie blonde et elle le jeta violemment sur Caesar, qui le prit en pleine joue, lui causant une blessure qui saigna légèrement. Le Lynch la regarda d'un air froid. Il avait esquissé un léger mouvement de recul, plus par réflexe que par peur, mais n'avait rien dit lorsque la pierre avait percuté sa joue. Et pourtant, celle-ci était plutôt grosse, tenant pleinement dans une grande main.
- Toutes les missions n'ont pas à être fructueuses, ça arrive de travailler pour rien. Tu peux nous voir comme tes petites mains, c'est ce que nous sommes après tout, dit-il simplement. Oui, ils étaient ses larbins, c'était un fait, et ça ne le dérangeait pas de l'admettre. Il savait pourquoi il était là, lui, et c'était aussi par choix.
Mélusine le regarda. Elle reprit la parole, après avoir eu son ego gonflé de voir Caesar soumis à elle.
- Je vous laisse une dernière chance de parler, et après je ne réponds plus de rien, dit-elle sans colère, sans expression, sans saveur, sans rien.
Caesar regarda Kazuki dans les yeux, ces deux trous creusés dans son masque : que comptait-il faire ?
Une fois que Caesar se retourna comme l'avait demandé Mélusine, Kazuki put retirer son masque et faire une sorte de rapport silencieux. De toute façon, ça ne servait à rien qu'il parle, il ne savait pas parler correctement. La femme n'eut pas besoin de plus pour comprendre de mieux en mieux ce qui s'était passé lors de leur mission et le Lynch ne lui avait pas tout dit. Elle reprit place sur son siège et Caesar en fit de même. A partir de là, elle commença à lui poser des questions qui n'avaient rien à voir avec la mission. Le Yaksha ne comprit pas ces questions... Enfin si ! Il savait plus ou moins ce qu'elles signifiaient, mais pourquoi demandait-elle ça à Caesar après avoir fait une seule mission ensemble ? Tout comme Mélusine, il écouta sa réponse, essayant de comprendre le plus rapidement possible chaque mot et le sens de ses phrases. Camarade de guilde... Travailler ensemble pour Hydra Roar... Elément important pour la guilde ? Savoir faire son travail et il le respecte. Il aurait pu être flatté que le brun le tienne en si bonne estime, c'était la première fois que ça lui arrivait.... Toutefois, il n'était pas si sûr pour savoir faire son travail vu le massacre qu'il avait fait à cause de sa nature Yaksha et Hydra Roar n'avait pas pour but de tuer... Du moins, ce n'était pas sa priorité. Ils devaient rapporter le lacrima bizarre de l'épave et tout ce qu'ils avaient fait était de prendre un petit bout vidé de magie.
Ensuite, vint le sujet des Yakshas. Kazuki savait ô combien Mélusine les aimait sinon il ne serait pas là. Cependant, ce qu'il ignorait dans cette histoire était que sa mère avait bien lutté pour en avoir un comme lui, d'autres y étaient passés avant et avaient trépassé. Là aussi, le bicolore ne fut que le spectateur de cette conversation. Son partenaire de mission les connaissait bien, même en dehors du conte, et savait que cette race n'avait pas que des qualités... A cause de lui... Même s'il avait tout fait pour éviter le pire, mais on l'avait libéré ! Ça lui faisait repenser qu'il devait demander quelque chose à Mélusine, mais rien que le fait d'y songer à nouveau, il avait comme une énorme boule au ventre lui écrasant tout son intérieur, sa respiration se fit plus rapide et des sueurs froides commencèrent à couler le long de son visage. Etrangement, il avait réellement peur d'y penser et cette sensation se fit plus forte en s'imaginant le lui demander. Peut-être qu'il ne valait mieux pas demander... Oui, ça devait être mieux pour lui de ne jamais avoir de réponse à sa question... Il devait oublier ce mauvais rêve qu'il avait fait étant enfant, ce n'était qu'un cauchemar !
« Je vous laisse une dernière chance de parler, et après je ne réponds plus de rien. »
Le jeune homme se sentit mal à l'aise, il n'avait pas tout entendu ni tout suivi... Comment avaient-ils pu en arriver là ? Le regard de Caesar n'arrangea pas la chose. Il n'était pas doué pour parler alors il ne fallait pas compter sur lui ! A moins que ce soit un message codé de la part de Mélusine pour faire parler le Lynch ? Non, elle le savait débile donc elle aurait été plus claire pour lui donner un ordre. Un long silence s'installa dans ce bureau. Kazuki dévia rapidement son regard des yeux de Caesar et tint fortement son tee-shirt de sa main non cassée, l'autre n'ayant jamais bougé depuis tout ce temps. Qu'est-ce qui allait bien pouvoir se passer s'il ne parlait pas maintenant et si Mélusine perdait patience ? Elle ne lui avait pas donné l'autorisation de s'exprimer d'un autre côté. Mélusine tapota son bureau du bout de ses ongles, de plus en plus vite pour montrer son impatience, et finit par s'arrêter. Elle se leva de son siège et lança un regard noir aux deux hommes :
« Il suffit. » Elle se tourna vers Kazuki. « Occupe-toi de lui. »
Hein ? Euh... Ah ?! Non ! Il n'en avait pas envie ! La mission s'était bien passée entre eux, il l'avait complimenté devant Mélusine et il s'efforçait de lui cacher des choses ! Caesar n'était pas quelqu'un de mauvais pour Kazuki alors il avait beaucoup de mal à se jeter sur lui pour montrer de quoi sa force était réellement capable... Et ce ne serait pas juste pousser contre le cadre d'une porte. La blonde fronça ses sourcils, trouvant le Yaksha long... Elle ne l'avait pas éduqué ainsi ! Elle ouvrit un tiroir de son bureau et sortit une arme à feu pour la pointer en direction de Caesar, se mettant à sourire malicieusement :
« Un Yaksha comme toi serait capable de laisser une vie disparaître sous ses yeux, sans rien faire ? Je le tue ou tu t'occupes de lui ? »
Elle insista sur le mot « occupe » pour essayer de lui faire comprendre qu'elle ne lui demandait pas de le tuer, elle avait encore besoin de lui et de sa magie. Elle ne le tuerait pas non plus, mais elle savait que Kazuki n'allait pas le comprendre et qu'il agirait avant qu'elle ne doive en arriver-là. Baissant sa tête et serrant un poing, le bicolore se pinça les lèvres. Ça lui faisait affreusement mal, mais il ne pouvait pas laisser une personne mourir sous ses yeux sans avoir rien tenté. Alors, il se jeta sur Caesar, faisant basculer sa chaise en arrière ainsi que lui-même. Il se redressa assez vite pour ne laisser aucune chance au Lynch de se relever et bloqua ses deux mains d'une seule main au-dessus de sa tête, l'autre étant inutilisable. Ses deux petites jambes tentèrent de coincer celles de son camarade de guilde malgré la différence de taille. Peut-être que le Yaksha pouvait légèrement y pallier grâce à la différence de force ?
« Par... Pardon... » Dit-il doucement à Caesar.
Puis, il serra sa prise sur les poignets de Caesar de façon à lui faire mal sans les casser pour autant. Une vie qui souffrait restait une vie qui souffrait et pour un Yaksha tel que lui, c'était très difficile à supporter déjà. Il se tourna vers Mélusine pour essayer de voir si c'était une bonne façon de s'occuper de Caesar. Kazuki n'irait pas plus loin puisqu'il lui laissait tout le luxe de s'en prendre à Caesar si elle le souhaitait. Elle avait toujours son sourire aux lèvres et avait posé son arme sur son bureau, ce qui le rassura quelque peu... Au moins, il n'allait pas mourir.
Caesar attendait une réaction de la part de Kazuki. Lui, il ne comptait rien dire. Ce n'était pas vraiment à lui de parler, de toute manière. Il avait promis à Kazuki de ne rien divulguer de son secret, ce n'était sûrement pas pour se mouiller une fois devant Mélusine, malgré les menaces de celle-ci qui devenaient de plus en plus imminentes. Sa patience était sur le point d'être épuisée. Il jeta à nouveau un oeil à Kazuki, sa main serrant son t-shirt tandis que l'autre était bien en place. D'ailleurs, il ne la bougeait que peu depuis qu'ils étaient sortis du canoë de sauvetage. Il s'était sûrement fait une entorse dans l'épave, ou pire : il se l'était cassée. Dans tous les cas, ce détail semblait avoir sa petite importance et ainsi il avait eu le temps de progressivement le remarquer. Mélusine, si elle l'avait aperçu, s'en serait de toute manière fichu, puisqu'elle décréta qu'il en était assez et qu'il était l'heure que Kazuki s'occupe de Caesar. Un éclair de mépris passa dans son regard azuré.
Mélusine, cette étrange mère, ou mentor selon le point de vue, de substitution, n'inspirait que du dégoût au Lynch. Il perdait petit à petit sa dignité en sa présence mais il n'en voulait de toute façon aucune. Il avait choisi depuis longtemps d'être son larbin, comme il l'avait dit plutôt en évoquant le fait qu'ils étaient "ses petites mains". Mais il n'appréciait vraiment pas de la voir traiter ainsi son acolyte de mission, alors qu'ils avaient fait bien plus que simplement mouiller le maillot pour ses beaux yeux. Une guilde pouvait-elle avancer avec un lieutenant pareil ? Mélusine, si aux yeux de Caesar et des autres était une autorité à Hydra Roar, ne devait pas être le leader qui les conduirait dans le prochain monde auquel ils aspiraient. Elle n'en était pas capable. Certes, il ne ressentait que peu d'émoi quant au sort des non-mages, mais il n'imaginait aucunement qu'une personne aussi imbue d'elle-même et dénuée d'empathie quelconque puisse améliorer ce monde. Seul le profit purement personnel l'intéressait, et Caesar le voyait de plus en plus, et c'était un comble pour quelqu'un d'aussi égocentrique que lui que d'être dégoûté de l'égoïsme d'autrui.
Cette réflexion qui avait rapidement parcouru le fil de ses pensées s'ancra subtilement, mais profondément, en son être lorsque Mélusine pointa une arme à feu sur lui. Un jour, c'était certain, il la tuerait. Il en était de son devoir. Shot d'adrénaline toutefois : il n'oubliait plus qu'il était désormais possible de périr définitivement en cette période de magie raréfiée. Mais la sulfureuse blonde serait-elle en mesure de tuer son protégé qu'elle chérissait, maladroitement, follement aussi, mais chérissait assurément ? "Un Yaksha comme toi" prononça-t-elle à l'attention de Kazuki. Caesar avait déjà compris depuis un moment déjà que son camarade en était un. Il avait l'impression que cela faisait des mois qu'il était parti en mission avec le masqué, mais en réalité, il ne s'était écoulé qu'une journée depuis. Il s'était senti plus proche de Kazuki, et ils avaient malgré eux partagés une situation désespérante où l'un avait dû prendre soin de l'autre à tour de rôle, puis également des autres qui eux n'avaient rien demandé. Caesar n'avait rien demandé non plus, mais Kazuki l'avait sauvé. Il n'avait jamais été bien sûr d'à quel point il était possible de mourir lors de cette illusion, mais il n'avait mieux pas valu tenter le diable. Alors, qu'en était-il de son côté ? Pourrait-il le tuer facilement, d'une simple requête de Mélusine ?
Heureusement, la blonde semblait préférer qu'il "s'occupe de lui, plutôt". Ah yes, un bon petit passage à tabac pas piqué des hannetons histoire de dormir à l'hôpital jusqu'à la prochaine période avec magie. Lui qui ne prenait jamais de repos, il allait être servi avec des congés forcés. Il bascula de sa chaise, car très vite Kazuki s'était jeté sur lui. Une proximité qu'il n'accordait à personne lui était imposée, et pas pour quelque chose de plaisant. Caesar savait que s'il résistait, si tout du moins pouvait-il seulement résister un tant soit peu à un Yaksha, cela allait être pire. Par réflexe, il essaya toutefois de se relever, mais fut très vite interrompu dans sa démarche par le masqué qui avait entamé cette altercation avec lui. Il lui coinça les mains, et la manière dont Kazuki évitait absolument d'utiliser une de ses mains confirma l'hypothèse qu'il avait émie plus tôt : il ne pouvait pas s'en servir. Plus petit que lui, il l'était effectivement, mais il essaya malgré tout de bloquer ses jambes, puis susurra un "pardon" timide. Caesar ne s'y ferait jamais, à cette voix toujours hésitante, frêle, comme si son compagnon avait tout simplement honte de parler. Malgré l'absence de magie en lui, celle qui décuplait ses ressentis et émotions, il devait admettre que cela lui faisait un petit pincement au coeur. Avoir honte d'exister était quelque chose qu'il avait ressenti tout le long de sa vie, alors il n'avait pas envie de le voir exprimé par d'autres.
Il laissa Kazuki lui abimer un peu les poignets, poussant un petit cri de douleur malgré tout. Mélusine ricanait derrière eux. Elle ne tenait plus en joue le Lynch depuis quelques instants déjà, et le plus jeune aux cheveux bicolores attendait son approbation en se tournant vers elle. La blonde voulait s'amuser, alors le sourire aux lèvres elle s'avança vers eux tandis que Caesar grimaçait encore sous la douleur de ses poignets pris en étau dans la main certes fine aux premiers abords, mais qui exerçait une pression qui était presque à couper le souffle. Le Lynch sentait, avec toute la vulnérabilité de son état de simple humain incapable d'user de magie, qu'à tout instant Kazuki pouvait facilement lui briser les mains d'un mouvement. L'adrénaline continuait de parcourir son être, mais moins puissamment cette fois-ci : si Mélusine voulait qu'il soit mort, il ne serait pas en mesure de poser son regard sur elle à l'heure actuelle.
- Alors, Caesar, tu comprends mieux, maintenant ? Je te tue quand je veux. Je te fais disparaître quand je veux. Je fais de toi ce que je veux. Ne l'oublie jamais, dit-elle d'une voix acide mais amusée.
Elle voulait lui donner une leçon. Peut-être était-ce aussi un moyen de resserrer son étau sur eux deux, au cas où ils songeraient un seul instant qu'ils pouvaient se moquer d'elle et en réchapper sans séquelle.
- Pousse-toi un peu, dit-elle sèchement à Kazuki. Relève-le, et tiens bien ses bras derrière lui.
Dans la voix de Mélusine se faisait ressentir une espèce de frustration, qu'elle ne cachait aucunement. Cette femme ne cachait rien une fois qu'elle était bien assurée d'être dans la sphère du privé. Elle se lâchait entièrement, signe qu'elle ne voulait plus retenir le moindre sentiment négatif. Malheureusement pour Caesar, il allait être son punching-ball. Ce dernier soupira. Kazuki lui tenait fortement les bras, mais ça faisait déjà un peu moins mal qu'au niveau des poignets. Il se préparait mentalement à se faire cogner comme un vulgaire sac à patates, mais il ne pouvait pas la laisser gagner totalement, c'était trop injuste.
- Si t'es frustrée à ce point, les vibromasseurs existent hein-
Il avait à peine pu finir sa phrase qu'un violent coup de poing dans le ventre lui coupa le souffle. Elle tapait assez fort, même si elle ne pouvait pas le blesser comme ça, ni même lui faire sentir de grosses douleurs si simplement, lui qui avait une bonne résistance à celles-ci. Mais le coup avait eu le mérite de le surprendre. Elle lui en remit un au niveau de la bouche, lui éclatant une lèvre au passage, puis du droit elle se concentra à nouveau sur son ventre. Les coups volèrent et s'enchaînèrent. Caesar peinait à respirer entre chacun d'eux, et le sang commença à couler de sa bouche, qu'il recracha alors en prenant soin de la tâcher, elle et sa belle robe blanche immaculée, contrastant avec son être d'une immonde noirceur. Elle reprit son souffle, s'essuyant le visage à la fois de la sueur et des éclaboussures du sang du Lynch.
- Tu as besoin de moi, donc ne m'amoche pas trop au moins, dit-il, fatigué tout comme elle de cet échange à sens unique. Des bleus étaient visibles sur son visage et des hématomes se formaient sur son ventre. Ses habits étaient un peu déchirés, tachés de sang également, mais il s'en sortait plutôt bien, non ?
Mais Mélusine semblait difficilement repue. Quelle était la suite ? Elle semblait prête à faire en sorte qu'il n'ait pas "que" quelques bleus et des hématomes. Le calvaire de Caesar n'était pas prêt de se finir, manifestement.
Au début de l'ordre, Kazuki eut du mal à comprendre ce que Mélusine lui demandait. S'occuper de lui dans de telles circonstances pouvait signifier tellement de choses, surtout venant d'une folle comme elle ! Toutefois, la compréhension fut plus rapide lorsqu'elle pointa une arme en direction de Caesar. S'il voulait empêcher sa mort, il devait faire quelque chose pour que la femme s'amuse. Le Yaksha se jeta sur le deuxième mage et le coinça. D'un regard caché par son masque, il chercha l'approbation de sa mère et la laissa punir Caesar sans qu'il ne puisse faire quoi que ce soit. Sa Nature Yaksha avait du mal à le supporter, mais son éducation lui avait toujours interdit de s'opposer à Mélusine. S'il le faisait, il suivrait... Ce n'était pas une si mauvaise chose sur le papier, mais venant d'une personne imprévisible telle que cette sorcière, on pouvait se demander si ça allait réellement sauver le Lynch de son lynchage (oh oh oh).
C'était sûr qu'elle pouvait faire sa maline lorsque sa proie était tenue par un Yaksha et qu'elle était en position de force. Tout le long, Kazuki ne fit rien et se contenta de lui obéir, même lorsqu'elle lui ordonna de changer la position de Caesar comme pour mieux le frapper. A chaque fois que le bicolore entendit le bruit d'un coup, il ferma les yeux, détourna son regard et serra les dents. Dans un sens, c'était douloureux et intenable, ce n'était rien à côté de ce que subissait son ancien partenaire de mission, pour lui de devoir rester les bras croisés quand une vie prenait cher. Il savait qu'elle ne disparaitrait pas pour autant, mais aucun bon Yaksha ne pouvait laisser une vie en détresse rester dans sa détresse ! Il voulait réagir et aider Caesar, mais quelque chose de plus fort l'en empêcha. Cette femme l'avait traumatisé toute sa vie et avait, en quelque sorte, réussi à lui écraser l'un des principes importants d'un Yaksha. Plus le brun recevait de coups et moins le plus petit pouvait rester là sans rien faire. Il y eut des éclaboussures de sang et ça commença à le faire paniquer. Que pouvait-il faire pour l'aider finalement ? Tandis qu'il cherchait comme il pouvait et avec ses moyens une solution, des petits « ah... » lui échappèrent.
Une courte pause s'imposa et Kazuki regarda le sol, toujours en tenant Caesar qui demandait à Mélusine de ne pas trop l'amocher puisqu'elle avait encore besoin de lui. Le Yaksha se tourna vers l'une des figures importantes d'Hydra Roar et vit qu'elle comptait reprendre là où elle s'était arrêtée. Sans y réfléchir plus longtemps et presque instinctivement, il recula Caesar pour lui faire esquiver un coup et se mit à hurler :
« France... Oie ! Isabelle Alric ! Alric... Les deux ! »
Malgré qu'il ait encore du mal à dire François, il s'était surpris à ne pas écorcher le prénom d'Isabelle. Comme pour donner plus de force à cette bonne prononciation, il fixa Mélusine d'un regard déterminé derrière son masque. Il ignorait si elle ferait attention à bien trouver ses yeux derrière ces deux trous, mais il ne la lâcherait pas pour autant. Qu'il se mette à parler des Alric n'était pas mis au hasard et ils étaient deux à le savoir. La blonde lâcha un long « hmmmmmmmm » autant pensif que légèrement étonné. Qu'est-ce qui lui prenait à ce bon à rien ? Comment connaissait-il le prénom de ses grand-parents ?! Pour ne pas montrer plus longtemps que ça l'avait déstabilisée, elle retourna s’asseoir sur son siège et tourna le dos aux deux garçons. Alors... Cette épave et ce lacrima venaient de sa famille ? C'était peut-être une aubaine qu'elle se devait de saisir ! Peut-être qu'en fouillant les archives de l'un de ses deux manoirs, ou des deux, elle retrouverait les plans de l'épave et l'endroit où ce lacrima a été trouvé ! Mais devait-elle y aller elle-même, envoyer Kazuki ou lui et le Lynch ? Telle était la question.
Pendant qu'elle y réfléchissait, Kazuki libéra Caesar et se mit face à lui pour voir si tout allait bien malgré tout. Il avait beaucoup de bleus, ses vêtements étaient déchirés par endroit, mais surtout, il y avait ce sang coulant continuellement de sa bouche. Sans demander une quelconque autorisation, il tenta de l'essuyer avec un doigt et appuya un peu dessus comme pour essayer d'arrêter le saignement à défaut d'avoir des pansements sur lui.
« Par... Pardon... » Il s'excusa à nouveau et baissa sa tête.
Il fallut attendre quelques petites minutes pour que Mélusine revienne auprès d'eux. Elle ordonna hautainement et sèchement au débile comme elle l'appela de tendre la main. Elle y posa une clé, lui disant qu'il devait sûrement savoir de quoi il s'agissait. En le comprenant, il se mit à trembler et à avoir des sueurs froides. Il eut du mal à lui demander pourquoi, mais son regard le fit pour lui et Mélusine le comprit comme elle pouvait aisément lire son fils :
« Tu chercheras dans les archives... Quoique non, tu n'iras pas seul vu que tu es débile. » Elle se tourna vers Caesar. « Tu l'accompagneras. »
Tant pis si les deux continuaient à s'attacher l'un à l'autre. De toute façon, elle se disait qu'elle n'aurait aucun mal à briser ce lien en les retournant l'un contre l'autre, ce serait même très amusant qu'ils continuent à s'apprécier pour mieux se détruire après. La dame insista grandement sur les mots archives et accompagner comme pour faire comprendre à Kazuki, et même à Caesar, qu'ils ne devaient pas aller plus loin que ça une fois qu'ils seraient sur les lieux.
Mélusine n'en avait pas terminé avec lui, mais manifestement Kazuki paniqua et cracha les noms des Alric après avoir fait reculer Caesar. Il le tenait toujours, alors forcément ce n'était pas compliqué pour lui de lui permettre d'esquiver. Le Lynch était un peu sonné, mais rien de dramatique. Mélusine n'avait pas tant de force physique pour lui casser réellement la gueule. Alors il comprenait et entendait pleinement ce qu'il se passait. Et effectivement, il comprenait bien l'énorme bêtise que Kazuki venait de faire.
Mélusine allait-elle se repaître de ces informations en apparence totalement sans intérêt ? C'était vite dit, avec elle c'était impossible de savoir tant elle incarnait si bien l'instabilité émotionnelle. Et venant de lui, c'était le comble. Manifestement, la blonde sulfureuse réfléchit un moment à cette intervention, ne faisant pas attention plus que ça à l'insolence de l'avoir empêché de porter son coup à sa victime. Caesar se retint de sourire. Alors, vraiment ? Cette information était pertinente, tout compte fait ?
Mais la réflexion de Mélusine dura encore quelques secondes, durant lesquelles Kazuki libéra sa victime qui chancela presque au relâchement de la pression sur ses bras. Il s'étira doucement, comme s'il avait repris possession de son corps qui ne lui avait plus appartenu pendant de longues minutes. Le flot léger, mais continu, de sang coulant à la commissure de ses lèvres fut interrompu par le doigt maladroit du masqué qui l'avait accompagné durant ce moment d'intimité détestable. Il l'entendit dire pardon, presque comme s'il s'agissait d'une supplique, et Caesar avait encore cette désagréable impression qu'il s'excusait d'exister. Il adoucit un court instant son expression, clignant des yeux doucement comme pour dire que ce n'était pas grave, mais le bicoloré baissa la tête.
Finalement, ce passage à tabac n'avait servi à rien car Kazuki avait abdiqué, mais il ne pouvait pas lui en vouloir. Caesar, lui, estimait qu'il n'aurait jamais rien cédé et encore moins à cette femme, mais c'était sûrement aussi dans un état d'esprit masochiste. Se faire casser la gueule ne le dérangeait pas après tout. Il en tirait du plaisir oui : celui de ne rien donner à Mélusine, et cela dépassait absolument tout. Elle revint au bout de quelques minutes auprès d'eux.
- Tends la main, débile.
Manifestement, elle parlait à Kazuki. Caesar fronça légèrement les sourcils en voyant ce dernier s'exécuter. Ils ne seraient probablement jamais libres, se dit-il. "Pas tant qu'elle serait là". Voilà une autre idée qui germait en lui. À ce moment-là, tout n'était pas encore clair en Caesar. Mais ça le deviendrait.
- Tu dois savoir de quoi il s'agit, ajouta-t-elle après avoir posé la clef dans sa main. Il bégaya un "pourquoi" bien trop faible au goût du Lynch, qui assistait presque avec dégoût à la scène de domination pure et simple. La voix de Kazuki était plus faible et tremblante que Caesar lui-même, et pourtant il venait de se faire cogner sans répit.
Mélusine lui dit de chercher dans les archives, avant de se raviser : pas seul, puisqu'il était débile. Encore ce mot rabaissant. Il soupira intérieurement. Vraiment, son idée de vibromasseur tenait toujours si elle était autant frustrée, hein. Il était même d'attaque pour lui en commander un sur Fairy Express, sans déconner. Elle s'était tournée vers lui pendant qu'il rêvassait, presque comme si ce qui s'était passé avant ne s'était jamais produit. Eh, il était du genre à passer à autre chose assez vite, en réalité. Elle lui fit savoir qu'il allait l'accompagner.
Elle avait une idée en tête, manifestement. Puisqu'il n'était pas du genre à discuter sauf superficiellement, en l'insultant dans sa tête ou en parlant narquoisement par exemple, il acquiesça.
- Bon chien, ajouta-t-elle avec un sourire sadique. Ah, tu m'as abimé les phalanges, il faut que je refasse ma manucure à cause de tes conneries, dit-elle avec un air agacé. - Très triste que tu aies dû abîmer d'aussi belles mains sur ma superbe personne, répondit-il en se retenant de ricaner, mais non sans un soupçon de moquerie bien palpable dans la voix.
Elle fronça les sourcils.
- Je te conseille de vous tirer avant que je ne remette ça, dit-elle froidement. Partez rapidement. Vous me ferez un rapport, et un bien détaillé cette fois. Mais ça, je pense que vous l'avez bien compris maintenant, finit-elle avec un sourire que Caesar aurait pu trouver angoissant s'ils étaient en période de magie, et s'il ne la connaissait pas accessoirement.
Ils sortirent de la pièce, fermant la porte derrière eux. Le Lynch se tourna vers Kazuki, avec un léger sourire.
- Ça s'est super bien passé, tu trouves pas ! dit-il joyeusement. Peut-être que le masqué n'oserait pas répondre à son sarcasme, peut-être même qu'il n'arriverait pas à passer à autre chose aussi facilement que lui. Mais Caesar n'en avait en réalité aucune idée. Il avait eu un aperçu des échanges entre Mélusine et lui, alors il songea à une réalité froide et brusque : ces échanges étaient quotidiens. Ils étaient pires que les siens avec la blonde psychorigide. Plus jamais il ne se plaindrait après ce qu'il venait de se passer. Il n'était clairement pas du genre à pleurer sur son sort, mais là il en avait encore moins envie. Il ne prenait toutefois pas en pitié pour autant Kazuki, car il n'avait pas envie lui-même qu'on le regarde ainsi. Il détestait ce sentiment, chez lui comme chez les autres. Alors il le regarda, simplement, avec un sourire, avant de lui dire qu'ils se reverraient un peu plus tard pour parler des archives.
Quoique Kazuki lui répondît après ça, cela n'empêcha pas Caesar d'aller se reposer sur son lit, dans sa chambre de ce piteux trou à rats des plus sombres, après avoir désinfecté ses quelques plaies pas si affolantes que ça tout compte fait. Il en avait vu des biens moins mûrs après tout.
Kazuki ne pouvait plus rester les bras croisés face à cette bagarre à sens unique. Il y eut une courte pause avant que Mélusine ne se décide à reprendre là où elle s'était arrêtée. Par réflexe et sans y réfléchir plus longtemps, le Yaksha aida Caesar à esquiver son nouveau coup en le reculant. Puis, il hurla le nom et les prénoms des deux personnes qu'ils avaient rencontrées lors de leur mission. Il ne pouvait pas deviner à 100% la réaction de sa mère, elle restait imprévisible tout le temps, mais il avait l'intime conviction qu'elle aiderait d'une façon comme d'une autre. La femme s'arrêta, sembla réfléchir et retourna s’asseoir à son bureau. Kazuki profita de cette nouvelle pause imposée pour voir l'état de Caesar et culpabilisa une fois que ce fut fait. Sans demander une quelconque autorisation, il tenta d'arrêter le saignement au niveau de sa bouche et s'excusa... Il ne pouvait pas faire mieux aux vues de ses capacités à parler, à agir et à comprendre.
Son partenaire de mission ne pouvait pas le voir, mais le bicolore eut une expression soulagée derrière son masque lorsqu'il lui fit comprendre que ce n'était pas grave grâce à ses expressions plus douces. Cependant, ce soulagement fut de courte durée, la blonde revint auprès d'eux et tendit une clé à Kazuki. Il ne lui fallut pas longtemps pour qu'il se souvienne de quelle clé il s'agissait. C'était la clé du manoir « pas à Fiore » comme il l'appelait et ce manoir était rempli de mauvais souvenirs... En avait-il des bons ? Oui, ceux passés avec son maître et... C'était tout ! Elle donna de nouvelles instructions, mais le Yaksha n'y fit plus attention à cause de sa peur et de sa panique. Il devait y aller avec le Lynch en plus ?! Qu'est-ce que ça voulait dire ? Elle s'en fiche que quelqu'un d'autre en sache plus sur elle ?! Ou c'était un message subliminal pour lui dire de l'éliminer une fois qu'il aurait la bonne archive ?Il ne comprenait rien à ce qui était en train de se passer et ça ne servait à rien de chercher plus loin, il ne pouvait que comprendre le concret, le visible et la clarté. Si elle ne lui disait pas ouvertement de tuer Caesar à la fin de leur recherche, il ne le ferait pas.
Les deux hommes quittèrent son bureau une fois que Mélusine leur ordonna de le faire. Kazuki se tourna vers Caesar sans comprendre son sarcasme ni la raison pour laquelle il semblait joyeux. Sur le moment, il le trouva juste bizarre. Il venait de se faire retenir et frapper et il en était ravi... Décidément, il avait encore beaucoup de choses à apprendre ! Le Yaksha baissa ses bras, ses épaules et sa tête, poussant un soupir bruyant et bizarre. C'était une façon comme une autre d'évacuer son stress, son mal être et de soulager son estomac car il avait eu l'impression qu'il s'était retourné à plusieurs reprises. Avant que Caesar ne parte de son côté, Kazuki lui montra la clé et lui dit simplement :
« Pas à Fiore. »
Il ne pouvait pas dire plus malheureusement... Il connaissait Fiore et sa signification car il ne comptait plus le nombre de fois où il avait entendu ce mot. S'il avait pu, il lui aurait dit de soigner ses blessures et de le retrouver une fois que ça irait mieux. Et son poignet ? Bah... Ce n'était pas grave, il ferait le moins de mouvement possible et poserait un bout de sol frais dessus pour calmer de temps en temps la douleur et cette sensation d'extrême chaleur dès qu'il serait dans sa « chambre », située sous des escaliers.
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